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mardi 7 mai 2013

Des business Angels au Crowdfunding


Toute dernière publication d'Acatl Editions, voici une réflexion originale qui parle business ET société. En ce début de 21ème siècle, l’innovation devient un des principaux vecteurs de compétitivité des entreprises, et des nations elles-mêmes. Notre compétitivité passe donc désormais par la maîtrise des nouveaux processus de financement des startups innovantes ce qui constitue le sujet de ce livre.

L’irruption du « financement participatif », appelé aussi « crowdfunding », nous place face à nos responsabilités quant à notre manière de faire éclore, de retenir et d’attirer des startups innovantes. Ce nouveau mode de financement a pour but de ré-aiguiller l’épargne publique vers l’économie réelle et est déjà mondialisé. Par ailleurs, le grand investisseur dispose de moyens importants et professionnels pour orienter cette innovation selon ses propres critères. Le Business angel classique se trouve ainsi pris en tenaille par des acteurs nouveaux sur une scène élargie. Comment faire en sorte, dans le contexte de la start up innovante, que la Finance s’investisse bien dans l’économie réelle au profit de la collectivité ? Pour l'acheter (vous nous feriez très plaisir), vous pouvez cliquer ci-dessous:


L’auteure est trois fois légitime :

Geneviève Bouché, vous la connaissez, elle était intervenue à TEDxLaDéfense. Elle a créé sa startup. Cette légitimité-là est celle du vécu,
G. Bouché
Elle a été en charge de politiques d’innovation dans la très grande entreprise et poursuit ce travail au plus haut niveau par le biais de diverses associations, think tanks et cercles de Business angels. Cette légitimité-là est celle de la compétence et de la vision,
Enfin, le contenu même de l’ouvrage est le résultat de réflexions communes menée au sein du Club Jade. C’est en tirant parti de sa formation d’universitaire et de futurologue que notre auteure formalise et met en perspective le travail d’un groupe de spécialistes et de nombreuses observations de start up qui resteront confidentielles. Cette légitimité-là est celle de la méthodologie.

Pour en savoir voici le lien vers son blog.

Que vous soyez business angel, dirigeant d’entreprise en création, chargé de projet dans une agence de développement, gérant de fonds ou élu, cet ouvrage devrait vous apporter :
  • Une synthèse opérationnelle des principaux constats à faire sous l’angle pratique d’une situation complexe, mainte fois stigmatisée, jamais vraiment comprise,
  • Une compréhension intime de ce qu’est «l’angelat» aujourd’hui, véritable mutualisation privée du financement de la start up innovante,
  • Une vision claire des tendances en cours à l’échelle internationale et nationale, des défis à relever et des pistes d’actions.

En quoi sommes-nous concernés ?

A n’en pas douter, ce livre est de nature à secouer quelques idées reçues et, espérons-le, à faire naître des vocations ou au moins faire évoluer notre approche de l’entrepreneuriat dédié à l’innovation. Je vous ai déjà parlé du Crowdfunding avec Babyloan et dans "le financement par la foule", rapprocher ce phénomène de l'angelat et de l'entrepreneuriat, c'est peut-être annoncer une vague de fond dans le financement de l'innovation et du renouvellement sociétal auquel au moins 15% de la population pourrait vouloir participer.

"Ca ne marchera jamais"

Je vous ai déjà proposé avec E. Chouard une solution "infaisable" (changer de constitution), en voici une autre "qui ne réussira jamais". C'est entendu, ce serait pour de rire alors ... à moins que ...

samedi 31 mars 2012

Argent 5, les monnaies du net

Dans cet article, nous poursuivons notre plongée dans le monde de la monnaie et de l'argent. Aujourd'hui, les monnaies du net offrent une perspective fabuleuse: même logique que les monnaies locales mais aucune limite géographique aux transactions.

Virtuellement une alternative au système financier global actuel !



J'ai bien connu vers 2004/2005 (et utilisé pour mon malheur) une monnaie virtuelle qui s'appelait e-gold et que l'Etat américain a réussi à faire interdire pour blanchiment et autres accusations. Vous voyez à quel point nous rejoignons ici ma série d'articles sur "copier ou partager" et notamment le cas megaupload ici et ici ! Du coup, il y a nécessité de se demander très vite comme avec Mégaupload ce que cette opportunité apporte vraiment et comment elle peut, comme Mégaupload, cacher de nouvelles déceptions.

Bitcoin:
Avec le net,  nous ne sommes plus guère dans le territorial n'est-ce pas ? N'en déplaise aux ennemis de la globalisation, les monnaies communautaires s'en accordent ! Voici donc le cas bitcoins dans un très court reportage de LCI en français:

Bitcoin est donc une monnaie virtuelle sur le net, lancée en 2009 par un programmeur de génie sous le pseudo de Satoshi Nakamoto. Totalement décentralisée, la monnaie est créée, protégée et authentifiée par un programme Open Source chargé sur tout ordinateur. Pour fonctionner le système a besoin de la puissance de votre PC et il la rémunère ... en bitcoins qui peuvent aussi être achetés, utilisés pour payer sur des sites marchands et même dans des magasins réels et échangés contre des monnaies classiques.

Voici le petit film qui présente bitcoin sur son site:


Le "mining" c'est l'action de creuser virtuellement c'est-à-dire de prêter la puissance de votre machine au système en échange d'une (modique) rémunération en bitcoins.

Pour une histoire (en anglais US) bien documentée de Bitcoin, je vous suggère la vidéo suivante tirée des conférences "Lift" (une sorte de TED) par Adrienne Jeffries journaliste au New York Observer.




Cette monnaie en peer-to-peer a attiré l'attention et deux sénateurs ont rapidement voulu l'interdire car un site, SilkRoad, vendait de la drogue et acceptait des bitcoins. En outre comme e-gold en son temps, cette monnaie étant anonyme, elle est accusée de pouvoir servir au blanchiment d'argent. Ses serveurs ont connu des tentatives de piratage, diverses opérations de spéculation ont fait grimpé puis chuté sa valeur, d'ailleurs voici la courbe d'évolution de sa valeur jusqu'en Février 2012:


On voit que la valeur a fortement baissé autour de 4$ pour un BC mais on voit aussi (traits rouges et verts) que son volume d'échange augmente car il y aurait quelques centaines de milliers d'utilisateurs. Le tout montre que son usage est bien ancré.

En quoi sommes-nous concernés ?

Il ne s'agit plus d'économie solidaire et pourtant il y a bien ici un aspect communautaire et comme toujours le net nous affranchit des distances. La communauté est ici virtuelle. 

On comprend aussi que les problèmes évoqués au sujet de "mégaupload" se reposent ... d'un côté, un buzz puis un mythe se créent autour de Nakamoto qui devient le prophète d'un mouvement contestataire pendant que de l'autre, on s'active pour démontrer que tout ceci est illégal et/ou n'est qu'un moyen d'enrichir les initiateurs du système au détriment de ceux qui y sont venus tardivement selon un schéma pyramidal (ponzi) classique.

Il est vrai que Bitcoin représente un vrai défi pour les "autorités" politiques et pour le système financier établis. Il ressemble aussi assez à une arnaque internet majuscule. Ne seraient-ce pas en définitive les deux face d'une même ... pièce de monnaie ? Preuve, en tous les cas, que la question de la monnaie est bien une affaire de confiance !

Retenons aussi que pour toute monnaie, il faut un organisme émetteur-régulateur afin d'empêcher toute fausse monnaie. L'originalité de Bitcoin est d'avoir confié cette tâche à ... un programme informatique !

Sachez aussi que d'autres monnaies sur le modèle de Bitcoin existent comme Namecoin qui est une évolution de Bitcoin ou un nouveau venu comme le Dwollah. On parle aussi de "Google wallet" et de "Facebook credits", faisant ainsi entrer en scène les géants actuels du net. L'histoire de Bitcoin pourrait bien être celle d'un laboratoire grandeur nature préfigurant des changements d'une magnitude bien plus importante.

Notons encore au passage que ces systèmes permettent bien sûr des échanges sur un téléphone mobile ... et pour la route, retour aux SEL voici les "cyclos" en hollande, plateforme de logiciels libres pour favoriser les échanges locaux sur votre smartphone ...

samedi 29 octobre 2011

Justin Hall Tipping: nanotechnologies et énergie




Après ma participation à TEDGlobal en Juillet à Edimbourg, je vous disais le plus grand bien de cet événement.

Parmi les nombreux intervenants de très grande qualité, Justin que j'ai brièvement croisé, est l'un des deux que j'ai placés tout en haut de ma liste. Voici sa conférence, elle vient d'être placée à la une de TED.com et n'est par conséquent pas encore traduite (je vais la traduire en Français du Canada, elle sera disponible dans une dizaine de jours):


Qui est Justin Hall Tipping et de quoi s'agit-il ?
Justin est le gérant d'un portefeuille d'investissements très original Nanoholdings. Il lève des fonds pour les placer dans des start up à fort potentiel ... Venture capitalist, histoire connue me direz-vous ! Mais depuis qu'il a assisté par lui même à la disparition en mer d'un iceberg continental de la taille de l'état du Connecticut (la taille de la Basse Normandie), il s'est mis en devoir de rechercher voire d'initier avec l'aide de chercheurs d'universités du monde entier des projets d'investissements capables de résoudre radicalement les questions d'énergie et indirectement de besoins en eau de la planète, rien que cela ! Voici une seconde vidéo présentant son cabinet Nanoholdings:

Nanoholdings from Friday's Films on Vimeo.

Malgré les affirmations actuelles, à mon avis hâtives, et en dépit des inquiétudes légitimes de tous ceux qui, comme moi, découvrent les errances de la finance d'aujourd'hui, il reste certainement de l'espoir à condition de placer les ressources financières,  intellectuelles et industrielles aux bons endroits ... Non seulement le capitalisme n'est certainement pas en train de mourir mais il semble peut-être bien capable de contribuer à résoudre certaines questions de survie qui se posent à court terme à l'humanité toute entière. Cela , ce n'est pas Justin qui le dit mais moi qui l'affirme. Nous verrons.

Je l'ai dit de nombreuses fois dans ce blog, il nous faudra certainement modérer nos appétits de croissance et nos besoins en matières premières comme nous l'enseigne par exemple Serge Latouche ET il nous faut impérativement continuer à rêver à des solutions technologiques. Voici donc une matière intéressante dans l'ordre du rêve technologique qui se mue en dessous de notre seuil radar en une réalité exploitable prochainement. Justin participe en effet au financement de la transition de certains projets de recherche universitaire vers le stade industriel dans le domaine des nanotechnologies appliquées à la captation, à la distribution et au stockage de l'énergie solaire et par conséquent aussi à la production d'eau potable.

Que sont et que font ces nano-solutions ?
Dans cette brève conférence, il est question tout du long d'une innovation fondamentale: le contrôle des flux d'électrons dans des "tubes" de graphite (voir illustration ci-contre) d'une épaisseur de l'ordre de 20 fois la taille d'un atome. Cette technologie, associée à d'autres, permet différentes applications. Tout commence en 2005 avec la mise en lien de plus de 180 chercheurs de 9 universités travaillant sur les nano-matériaux, bel exemple de partage des idées à creuser.

Tout d'abord JHT nous présente le résultat de la re-condensation de carbone vaporisé qui produit un film souple et transparent. Ce matériau peut se transformer à volonté sous une micro impulsion électrique. Il peut à volonté laisser passer toute l'énergie lumineuse ou calorifique ou au contraire la réfléchir. Cette sorte de "nano-polarisation" permettrait, en associant ce nouveau matériau à un polymère ad hoc, de recouvrir toute surface (murs, toits, vitres) et ainsi de produire tout le chauffage et l'éclairage nécessaire à toute habitation.

Ensuite, JHT présente une recherche associant deux composants (un détecteur et un "imager" électronique) qui permet de créer un matériau souple et transparent, là-aussi, permettant de capter les infrarouges et à partir de ce flux, de recréer une image fidèle dans le spectre visible. Un système de vision nocturne très performant. Je me souviens lors de la crise du pétrole en 1974 des mesures gouvernementales de coupure de  l'éclairage nocturne, voilà peut-être en soi une technologie sympathique permettant d'économiser l'éclairage public et de sécuriser par exemple pour les automobilistes. Mais il y a nettement mieux.

Si l'on associe ce deux matériaux, on obtient un film transparent et souple qui peut recouvrir n'importe quelle surface. Il permet de capter ou de réfléchir à volonté l'énergie solaire ET de la convertir en électrons donc en énergie électrique permettant d'alimenter toutes sortes d'appareils. Nous avons-là une centrale de production électrique miniature. Et JHT donne ainsi des arguments concrets à Jérémy Rifkin: pourquoi maintenir nos centrales (qui portent trop bien leur nom) nucléaires ou thermiques, construire des barrages ou même immerger des hydroliennes si toute habitation peut devenir totalement auto-suffisante ? Il est évident que la génération Y née avec l'internet se saisira d'une telle solution décentralisée et enverra aux oubliettes les lobbys actuels de l'énergie.

Pourquoi pas ? Mais parce que cette énergie n'est pas facile à stocker à moins de se doter de dizaines de racks de batteries plomb-acide comme le rappelle JHT. Notez au passage que P. Baronnet le fait chez lui depuis plus de quinze ans ce qui lui évite d'avoir un compte EDF. Mais il est vrai que les batteries actuelles (technologie inventée au 19ième siècle) sont lourdes, peu efficientes, sales et doivent être remplacées régulièrement. En plus, elles sont difficiles à recycler ! JHT enfonce donc le clou en nous présentant son ebox qui permet de stocker les fameux électrons captés précédemment en utilisant également nos fameux nano-tubes de graphite recondensée. CQFD.

Mais JHT n'en a pas fini. Vous voyez immédiatement à quoi tout ceci nous servirait dans nos maisons, nos bureaux et nos voitures, comment nous pourrions ici recombiner les facteurs de production, de distribution et de stockages de l'énergie de façon plus économique et plus propre ... Toute une économie à réinventer sur la base de ces nano-innovations. Hé bien il y a encore mieux à faire sur notre planète. Et c'est d'appliquer ces techniques hyper-locales à la production d'eau potable notamment à partir d'eau de mer très coûteuse à désaliniser en masse afin de produire les 8 verres d'eau journaliers nécessaires à tout être humain. Or de nombreuses parties de la terre manquent déjà ou manqueront d'eau...

La conclusion de JHT:
Pour lui, c'est clair en 2000, la presse trouvait normal qu'un iceberg grand comme le Connecticut disparaisse dans l'océan antarctique et c'est cette "normalité" non-remise en cause qui est la cause de notre incapacité à réagir. Or exactement dans le même temps, nous apprenions à séquencer le génome et maintenant presque dans le même mouvement et également dans l'infiniment petit, nous apprenons à capter et à gérer l'électron dans des nano-tubes de graphite qui nous permettent sur des prototypes de développer des solutions propres et économiques aux problèmes d'énergie et d'eau de la planète !

En quoi cela nous concerne-t-il ?

1) Sous réserve de vérification de faisabilité économique (calcul économique du coût de fabrication, d'installation et de maintenance des produits dérivés) et de faisabilité environnementale (calcul de l'empreinte carbone de cette nouvelle industrie), comment ne serions-nous pas séduits ?

2) N'y aurait-il pas là pour des investisseurs et des entrepreneurs un champ de réalisation gratifiant à la fois intellectuellement et économiquement, nous montrant du même coup que le Capitalisme peut servir à des causes centrales pour la survie d'un écosystème planétaire viable ?

Enfin JHT vient de me confirmer son accord de participer à notre TEDx... j'espère qu'il pourra développer ces deux points en français comme il me l'a proposé.

mercredi 12 octobre 2011

Yann Leroux sur la réalité de l'addiction au net et aux jeux sur le net

Mes deux derniers billets évoquaient le décès d'un entrepreneur mythique des NTIC et du net: Steve Jobs. Aujourd'hui, j'aimerais remettre au clair une notion très galvaudée liée à notre nouvel environnement technologique: l'addiction au Net en faisant appel aux recherches d'un psy très spécial, Yann Leroux, ci-contre.

Un journaliste du nom de Nicolas Carr sort ces jours-ci un bouquin polémique (que je n'ai pas lu !) Internet rend-il bête ? : Réapprendre à lire et à penser dans un monde fragmenté où il fait son coming out, se proclamant « web addict ». Et la presse de se demander à sa suite si le Net nous fait perdre la tête … (mes sources: le gratuit « métro » du 5 Octobre 2011 p 4 et 5). Grave problème donc puisqu'il en fait un livre et que c'est écrit dans le journal !

Je vous propose tout d'abord de visionner la vidéo de Yann Leroux, "psycho-geek" de terrain qui travaille avec des jeunes sur le rôle et l'impact non du web en général mais des jeux en ligne (pire) et particulièrement des jeux de guerre temps réel (encore plus pire !) pour être précis:
Vidéo 1 sur l'addiction:
Vidéo 2 sur l'apprentissage:

J'ai croisé Yann Leroux à TEDxBasqueCountry l'an passé et j'ai bien aimé son propos à la fois posé, éduqué, vécu, iconoclaste et pragmatique. Yann, lui aussi, avoue publiquement jouer à des jeux en ligne dont il a fait en outre son sujet de thèse de psychologie soutenue cette année.

Malgré un look « rasta » il ne me semble pas du tout « addict ». Voici le résumé de sa conférence TEDx (que je n'ai pas trouvée sur Youtube !): Le jeu vidéo est d’abord un espace de médiation entre un sujet et sa culture car les jeux reprennent des thèmes qui travaillent une culture à un moment de son histoire. C’est ensuite un espace de médiation entre un sujet et son groupe d’appartenance car il constitue des zones de rencontre, de transmission et/ou de conflit entre un sujet et ses groupes d’appartenance.

Faites-moi l'amitié de retenir comme le dit Yann qu'aucun travail scientifique sérieux n'a retenu la notion d'addiction en matière de jeux électroniques « on » ou « off line » et encore moins relativement au Net globalement. Cela n'exclue pas que l'excès de jeu ou de Net puisse signaler une pathologie. A l'inverse le jeu et le Net peuvent faire partie du remède ! Plus encore, dans sa conférence de Biarritz, Yann relatait un travail qui m'a époustouflé (thème du TED de Biarritz: la paix). A l'occasion de recherches sur les conséquences familiales durables de traumatismes causés pendant la seconde guerre mondiale dans certaines de nos campagnes aquitaines, les jeux de guerre auraient permis de rendre un peu de sérénité à certains en libérant la parole sur des atrocitées passées, devenues taboues mais dont les effets se transmettaient d'une génération à la suivante !

Retenez aussi que la consommation de web et de jeux ne touche pas que les jeunes, très loin de là, âge moyen des joueurs: 35 ans !

Pour aller un peu plus loin:

Je fais remarquer au passage à mes amis du CMAP (Centre de Médiation de Paris) la position originale du jeu comme « espace de médiation ... ».

Pour ceux qui voudraient creuser le thème psychanalyse et Ntic, je vous suggère l'interview de Y Leroux justement sur le blog d'Antoine Dupin.

Pour ceux qui seraient intéressés à creuser le sujet du supposé impact négatif du web sur l'attention, je les renvoie à un travail charpenté de Jean Philippe Lachaux, chercheur à l'Inserm: Le Cerveau attentif. Le sous-titre dit: "contrôle, maîtrise et lâcher-prise". Tiens-tiens encore le lâcher-prise ! Extrait de son entretien au même journal « Métro »: « avec l'avènement du web, nous sommes exposés à un flux incroyable d 'informations … pour faire face le cerveau doit faire appel à sa capacité d'attention … le web est un outil … comme un marteau, il est incroyablement utile sauf s'il sert à taper sur la tête du voisin. Le cerveau ne s'est pas détérioré, il s'est adapté, on utilise peut-être plus la mémoire à court terme pour gérer le multi-tâche que la mémoire à long terme ». Pour finir, ce chercheur conseille d'accompagner le phénomène notamment à l'école afin de ménager des activités de concentration mono tâche et un apprentissage de la gestion des priorités. Tiens cela ne vous rappelle-t-il pas les dangers du mode interruptif continuel via le mail et le téléphone qui sévit dans nombre d'entreprises ?

Si vous voulez en savoir plus sur le bouquin de Nicholas Carr voici un lien vers une émission que Radio Canada lui a consacré, à vous de vous faire une idée.

En quoi ceci nous concerne-t-il ?

Si comme certains des miens, vos ados passent beaucoup de temps sur le net ou les jeux, tout espoir n'est donc pas perdu, mieux, le Net peut être une solution (mais à doses raisonnables toute de même, car l'excès de toute chose peut-être nuisible voire fatal) ! A condition de traiter le sujet avec une réelle compréhension et non avec des préjugés qui n'ont rien de scientifiques ! Tenez faites ce petit test que m'a suggéré Yann: si l'un de vos enfants passe beaucoup de temps sur le Net ou sur un jeu, demandez-lui de vous expliquer, à vous qui êtes un(e) noob*, comment ça marche … S'il prend le temps et qu'il vous explique patiemment, c'est qu'en tant que parent vous n'avez pas fait un si mauvais travail et que ce gamin n'est peut-être pas aussi gravement atteint que vous le pensiez. Et addict ? Oubliez !

Méfions-nous des idées toutes faites sur tout et n'importe quoi. Le concept d'addiction dans ce domaine semble évident au premier abord et pourtant, il n'a de réalité que journalistique et non scientifique. Je parie que M. Carr est en réalité plutôt accro aux ... droits d'auteur et à la notoriété.

Enfin, je saisis ce thème de la web-addiction pour souligner l'urgence qu'il y a de se désintoxiquer du prêt-à-penser médiatique. Pas si triste finalement que l'audience de la grande presse et des TV classiques ait tendance à reculer au profit de certains coins du Net justement !

Pour finir merci à mon grand "geek" de Maxime pour la vidéo que voici, il s'agit d'un pastiche réalisé par les journalistes d'un site qui traite de jeux http://www.jvn.com/ Juste pour comparer les styles FR2 (au début) et celui des fans de jeux ... Carr avait au moins raison sur un point: notre société est fragmentée. On ne se méfie pas mais j'ai l'impression que certains sont vieux de plus en plus tôt pendant que d'autres restent jeunes de plus en plus tard ! Donc pour vous désintoxiquer des idées-reçues, voici:

*abréviation péjorative de newbie, c'est-à-dire un débutant dans le domaine informatique.

samedi 1 octobre 2011

Kate Hartman: interfaces, art et humour

Hi everybody,

This is my first article in English to welcome a few international guests … You'll find the French version just below (and slightly different !).

Here is the TED video (don't forget to select the subtitles at the bottom of the screen, they will be on line very soon, I am told):

This talk raises a bit of a controversy. Although the subject is totally different, it reminds me of Edward Tenner on «unexpected consequences ». I have just finished the translation of Kate's talk subtitles in French just the way I finished those of Mr Tenner a couple of weeks ago and much in the same way, I suddenly discover criticisms on the TED forum. Criticisms are fine to me but I'd like to share with you my personal experience with this talk. At first, like some of you, I was not impressed. Then after finishing the translation, I slowly realized the importance of kate's message.

I first viewed her creations as funny ways to attract attention. Not art really, not science for sure. Just humour at best. Then, going through the text and symbols one by one, I realized that Kate is a fantastic educationalist. The very reactions about her talk are in themselves an evidence of what she is saying. I am no serious judge about Art but I suddenly understood how deep her message ran about « LISTENING » and how this might shape our personal and collective future...

Let's quickly review a few things that this talk brings to mind:
  1. About TED. Remember that TED is not Youtube. All talks are recorded live and are part of an event with its own dynamic. Refrain from viewing a TED talk as a plain lecture. It is not. It's a performance. Hence, some talks are serious and technical, most carry emotions and some are humorous or strange. This one is all of that … and subtle. But there is more in Kate's case.

  2. About humour. What are we laughing or smiling at ? Kate's quirky hats ? No, as always when looking in the mirror of humorists, we actually mock ourselves ! One can either listen to a boring lecture by an old professor about why our world goes astray especially with our young traders and execs lodded with smartphones and apps … and somehow loosing the sense of reality … Or one can simply laugh at Kate's provocations and understatements …
  1. About teaching. Kate does not cheat. She tells us that she teaches some kind sophisticated « interfaces » for geeks who try to communicate with the physical world (physical computing, hard to translate by the way !). A talk like this one is possibly a sort of secondary or even tertiary interface for Kate (just guessing). I lecture and sometimes organize talks. I do realize that conveying such a message to an audience of that caliber at her age must represent some kind of a challenge. And in spite of some rapid judgements some people are making, her message is highly effective !
  1. About interfaces. Designing interfaces or inspiring them is surely no little task. Think of the work done from our green screens some time ago to the devices we have in our pockets today. These devices tend to shape our lives nowadays … But to what avail if we don't not how to relate … ? The subject of this talk is not a minor one.
  1. About Art. Kate is an artist too. Some people seem to have a different view of what Art might be. Same old problem. What is Art ? What amount of interpretation does the very concept of Art embodies ? These hats may not be deemed « beautiful » or « artistic ». But listen to the story they tell, our story ...Well, I think her pedagogic performance with them is truly artistic ! French philosopher Luc Ferry recently emphasised the major role played in 19th century Paris by the marginal poets and artists (« la Boheme movement») inspiring, provoking and transforming our old traditional « bourgeois » society. Our bourgeois class refused Boheme Art of course but finally adopted the underlying innovative caracteristics of their new taste and life style that ultimately produced our consumer society … for good and bad ! Ferry has it that those marginals in Paris, London and the big cities of that time started a revolution much more effectively than another marginal of that period named K. Marx !
  1. About scammers. Yes some would-be artists are scammers. But also remember that most artists of all times were at first ignored and often persecuted. I would be cautious here and the term "scam" does not, at any rate, apply to Kate Hartman's work.
Why should we bother ?

Kate, to me, is totally congruent. She simultaneously offers us the opportunity to see, ear, feel, and understand a simple but central message: how do we relate … ? She implies that we run the risk of loosing, individually, collectively and as a Society, our essential connections to ourselves, to others and our environnment. And she conveys her message with a big smile ! That, to me, is a piece of Art that no teacher, no parent and no business leader should choose to ignore.

Here is Kate's blog.

Voici maintenant l'article en français que j'avais préparé initialement, les bilingues verront que le sens général est ... en fait le même ! Je viens de traduire les sous-titres de cette vidéo en français pour TED.com. Visionnez-la et dites-moi ce que vous en pensez.

Quoi que très différente, cette courte conférence me rappelle un peu celle d'Edward Tenner sur les conséquences inattendues de l'innovation. En traduisant Kate Hartman, je me suis pris à l'apprécier énormément alors que de prime abord, j'étais un peu déçu. Mais étant engagé vis à vis de TED, j'ai donc prêté l'oreille … or c'est de cela dont nous parle Kate ici: de prêter l'oreille (y compris au sens propre). Et comme avec E. Tenner, j'ai découvert des tas de choses que les critiques sur le forum de TED ne semblent pas tous percevoir.

  1. TED: tout d'abord, un événement TED n'est pas forcément une série de conférences sérieuses. Celle-ci est drôle. Pas dans la forme seulement, vous savez le petit mot qui fait sourire. Non, drôle dans sa conception. On va bien au théâtre écouter des humoristes ...
  2. Kate nous fait rire et comme chez les humoristes, de quoi rions-nous ? De ces chapeaux bizarres ou de nous-mêmes ? On peut faire une conférence barbante quand on est un vieux barbon pour expliquer que notre monde va de travers parce que nous sommes tous, les jeunes surtout, l'oreille collée à son téléphone ou les pouces sur le clavier de son smartphone. Ou l'on peut décider d'en rire et de faire rire.
  3. Kate ne nous prend pas en traître, elle nous l'a dit elle enseigne. Qu'est-ce qui est le plus efficace pédagogiquement une longue conférence triste ou ce show rigolo ?
  4. Kate est designer en interfaces … cela ne vous parle pas mais j'imagine que l'on trouve derrière ses travaux des applications du genre de ce qui fait l'originalité de nos joujoux technos d'aujourd'hui: depuis l'interface objet qui a remplacé l'écran vert de nos premiers Pcs jusqu'aux écrans tactiles et autres centrales d'inertie qui rendent possibles les Iphones et autre consoles WII …
  5. Kate est artiste aussi. Il en est pour écrire dans le forum de TED qu'il ne faut pas confondre le vrai Art avec ce « foutage de gueule ». Je vous renvoie à la très intéressante conférence de Luc Ferry «Philosophie du temps présent» qui nous parle du Paris du 19ième qui a vu les artistes «bohèmes» et les cercles anarco-fumistes, sous couvert de pensée révolutionnaire, tout d'abord remettre en cause le monde bourgeois statique traditionnel plus sûrement que Marx puis lancer l'habitude de désobéir mais aussi celle d'innover puis de consommer et de changer de nouveau créant pour le meilleur et pour le pire … notre monde de consommation qui se cherche désormais une fin honorable.
  6. Kate est une artiste dit-elle. Certains en doutent. Se souviennent-ils que le partage entre le bien et le  mal en cette matière désigne plutôt la ligne de partage entre sensibles et endormis. Qu'a-t-on dit des surréalistes, de Cocteau, de Picasso, de Vian et même de Baudelaire ou de Michelange à leurs débuts ? Les poètes sont toujours en avance et l'on oublie toujours les escrocs qui les imitent. Simplement, la poésie est peut-être maintenant à la fois dans l'Art « éphémère » plutôt que dans les musées et dans le design des futurs objets du quotidien.
En quoi cela nous concerne-t-il ?

Eh bien, certains disent qu'ils ont perdu leur temps à écouter Kate. Moi, je la trouve bien gentiment espiègle et bigrement plus subtile qu'il y paraît. Libre à ceux qui ne veulent pas s'ouvrir à son message d'y voir une arnaque intellectuelle. Il y a bien pire, un jour je donnerai des noms !

Tout au contraire, Kate est un monstre de congruence pédagogique qui nous donne simultanément à voir, à sentir et à comprendre (quand on veut bien) les risques que nous courons individuellement de mal nous écouter nous-mêmes, de mal nous entendre collectivement et « sociétalement » de ne toujours pas nous ouvrir aux messages de notre environnement. En tant que prof, parent ou responsable, il y a là des leçons à prendre … sans se prendre au sérieux.

Conclusion générale:

Notre société n'a plus de temps à perdre. Ce sont désormais directement les acteurs de l'avant-garde qui, comme Kate, conçoivent les objets technologiques de notre futur quotidien. Mettons nos montres à l'heure, la transformation est déjà largement commencée !

vendredi 16 septembre 2011

Edward Tenner: les conséquences inattendues de l'innovation

Voici une conférence TED d'un historien des technologies moins banale qu'il y paraît. Edward Tenner nous présente ici une vision "non-linénaire" du "progrès technologique". Vision ni idyllique, ni apocalyptique, mais sérieuse et utile. Cette conférence est un peu elliptique et, pour la traduction française que j'ai faite pour TED.com, il m'a fallu reconstituer une partie de l'articulation logique de la pensée de ce chercheur. Mais cela valait la peine.

Les idées sous-jacentes me semblent non seulement dignes d'intérêt mais, à la réflexion, elles sont extrêmement riches, voici:


L'innovation technologique a parfois, et même souvent, des conséquences inattendues comme l'illustrent les exemples cités par Edward Tenner. Le progrès technologique et les améliorations qu'il apporte au quotidien sont loin d'être un processus régulier et inéluctable. Tenner nous présente ici de nombreux exemples édifiants.

Quelles sont les leçons des anecdotes rapportées par E. Tenner ?

1) Le Story Telling: Même si certains ont trouvé cette conférence mal construite, il y a de très nombreuses idées et leçons à en tirer. C'est vrai, une suite d'anecdotes ne suffit pas et Tenner n'est pas un grand orateur, et pourtant, la conférence a été vue plus de 140000 fois en quelques jours, c'est cela la magie de TED. Compte tenu de la richesse sous-jacente des recherches de E. Tenner et de ses collègues, ce film ne leur rend pas totalement justice. C'est peut-être la limite du "talk" de TED. Raison de plus qui fait qu'une conférence TED doit être travaillée avant: répétée et re-répétée puis creusée après. Eclaircissements:

2) L'impact de la technologie sur l'évolution de l'humanité elle-même: l'agriculture est un progrès indéniable de l'humanité or les chercheurs montrent qu'initialement et pendant des siècles le progrès technologique a eu nombre de conséquences négatives. Raccourcissement de l'espérance de vie, diminution de la qualité de la ration alimentaire, asservissement de la femme, inégalités sociales accrues ... Les baguettes au Japon amenèrent une diminution de la denture et de la dent elle-même. Alors progrès ou reculs ? Heureusement qu'aucune ONG n'a mené d'enquête sur les conséquences de l'agriculture mésopotamienne (pourtant essentiellement bio !)  il y a 10000 ans car les conclusions du rapport eussent été dramatiques !

3) Les essais/erreurs: l'histoire de la médecine montre qu'il a fallu très tôt faire attention à ne pas causer plus de mal au patient qu'avant le traitement. Jusqu'aux débuts de la neurochirurgie qui montre que sans un travail minutieux de notes sur tous les essais et erreurs des interventions, cette discipline n'aurait pas avancé. Il fallait que les patients soient ignorants ou désespérés mais au bout du compte, nous en bénéficions aujourd'hui.
 
4) La complexité: au 19ième siècle, à ces effets inattendus et aux tâtonnements du passé s'ajoute un nouveau phénomène, celui de la complexité (dont je parle souvent dans mes billets). Tenner nous parle de Mark Twain qui s'est ruiné en faisant la promotion du typographe Paige, merveille de technologie pour l'époque mais monstre de complexité mécanique. Où l'on voit d'ailleurs que toujours plus d'une solution qui marche (ici la mécanique) peut conduire à l'impasse. Il fallait une rupture technologique pour faire proprement ce que la Paige faisait, il fallait attendre l'offset puis la photocomposition numérique.

5) Les leçons des catastrophes et des crises: le Titanic a coulé et beaucoup de passagers sont morts parce qu'il n'y avait pas assez de canots de sauvetage. Puis l'Eastland a chaviré à Chicago plus ou moins parce que l'on tiré des leçons du Titanic: on a rajouté des canots. Mais on a omis de repenser l'agencement et le lest et ce bateau a coulé emportant 815 personnes avec lui. Les catastrophes permettent de tirer les leçons mais il faut parfois plusieurs catastrophes pour tirer les leçons des erreurs des leçons de la précédente ... J'espère pour mes amis de Flamanville que nous n'aurons pas besoin d'un autre Fukishima dans le Cotentin pour tirer les leçons de nos approximations dans le nucléaire ...

6) Le risque des politiques de sécurité: parmi les leçons des catastrophes, il y a les procédures et les politiques de sécurité. Le chavirage de l'Eastland est un exemple mais nous en avons d'autres autour de nous. Je parlerai peut-être du grand guignol des mesures anti-terrorismes dans les aéroports mais je vous livre ici un fait divers qui concerne l'automobile et dans ce cas une "deutsches Auto": l'audi A6, voici le lien qui raconte comment un jeune fêtard est mort asphixié cette fin Août, piégé par le système anti-vol du véhicule familial. Il ne fait pas bon de s'endormir au volant mais encore moins de s'endormir dans une voiture de luxe verrouillée.

7) La collaboration: nous l'avons vu, les grandes crises ou les grandes catastrophes sont l'occasion de progrès technologiques une fois la complexité maîtrisée et les tâtonnements effectués. Les grandes crises ou guerres par exemple comme celle de 1940 sont aussi des aiguillons très fort du progrès. Exemple: la pénicilline découverte en 1928 et qui était produite expérimentalement en très petites quantités jusqu'au début du conflit. L'impératif d'améliorer les soins sur le champ de bataille a poussé les laboratoires à partager leur savoir et à collaborer (poussés par l'Etat américain) et en moins de 2 ans, l'industrie américaine produisait ce médicament par cuves de 40000 litres !

8) La pluridisciplinarité: au delà même du simple partage de connaissances entre experts d'un même domaine, il y a lieu d'observer les phénomènes technologiques de manière pluridisciplinaire, d'autres diraient "écologiques" (au sens de l'étude systémique des relations dans leur environnement et non au sens politique). Prenez l'histoire des lecteurs de bandes magnétiques d'IBM des années 70 qui tombaient en panne systématiquement lorsqu'ils étaient placés à côté d'un conduit de ventilation. La cause ? La composition chimique d'un bactéricide des systèmes de ventilation contenant des particules d'étain assez volatiles et mortelles pour les têtes des baies de lecture. Et pourquoi un bactéricide ? Pour combattre la légionellose ! Comme dit Tenner, c'était la première fois que des systèmes mécaniques (et avec eux des ordinateurs) succombaient des suites d'une maladie humaine !

9) L'écart entre développement technologique et prévisions des effets: du fait de tout ce que nous venons de dire, il y a lieu de travailler à comprendre et réduire l'écart entre le progrès et les prévisions des innovations technologiques. Pour Tenner le premier est en fait imprévisible mais il est globalement en croissance géométrique alors que nos prévisions "contrôlées" sont au mieux en croissance arithmétique. D'où un écart croissant et une perte de contrôle croissante. Cela peut expliquer le sentiment d'impuissance croissant que tout un chacun peut avoir. Faut-il pour autant revenir frileusement en arrière ... si tant est que cela soit possible ?

10) L'innovation en temps de grand stress (crises): 1929 et la grande Dépression qui a suivi est la décennie la plus féconde en innovations, la deuxième guerre mondiale a vu la mise en oeuvre industrielle d'inventions absolument majeures. Sans surprise les périodes de crises sont donc des périodes de grand stress créatif. C'est donc aussi sans surprise que notre présent marqué par la révolution des TIC et bientôt des bio-techs et des nano-techs sera vraisemblablement une période de ruptures majeures, d'ordre civilisationnel. Notre crise financière en est certainement un symptôme.

11) La rupture créative individuelle: sur un plan individuel, Tenner nous raconte l'histoire de l'invention du copieur de Rank Xérox dans les années 30 par un avoué aux dépôts de brevets qui ne trouvait pas de meilleur boulot mais qui en avait marre des systèmes de reproduction de l'époque. Le stress de la rupture individuelle par exemple dans une carrière est aussi une cause de créativité technologique.

12) Le principe de sérendipité: dans le cas de l'étude de Pasteur sur les vers à soie, Tenner nous dit que le hasard et ses conséquences chaotiques l'ont amené, partant d'un problème circonstanciel dû à la surexploitation industrielle du vers à soie, à formuler des principes généraux à portée majeure sur la biologie microbienne. Je me permets d'aller un cran plus loin. Adoptons l'état d'esprit du Prince Sérendip d'Horace Walpole et soyons prêts à accueillir les découvertes que nous ne cherchions pas mais que nous faisons tout de même. Cette fable a donné le concept de Sérendipité bien connu des cogniticiens.



En quoi cela nous concerne-t-il ? 

La foi et la nécessité: nous vivons avec ce dilemme depuis l'aube de l'humanité. A la lecture des conséquences inattendues et négatives relatées par E. Tenner, certains seront tentés de vouloir mettre la créativité technologique humaine sous contrôle pour sécuriser et probablement geler le tout comme l'inquisition apostolique et romaine. D'autres regarderont les conséquences bénéfiques des progrès technologiques et s'en réjouiront au point de développer des errements "scientistes". Ce sont à mes yeux les deux côtés éternels de la même médaille. L'important est probablement dans l'épaisseur de la médaille dont Tenner nous fait prendre conscience si on veut bien l'écouter sérieusement.

Le pouvoir du "ET": Nous sommes face à des défis écologiques, économiques ET sociaux sans précédents ... ET nous disposons de compétences et d'une expérience collectives sans précédent. Il y a donc des risques ET nous pouvons y faire face si nous le décidons. 

Je ne dirais donc pas comme E. Tenner que le chaos advient et qu'il faut en faire le meilleur usage. Je dirais plutôt que nous n'avons pas le choix et que la nécessité est un meilleur aiguillon que la recherche de sécurité. Pour ma part, je pense que nous allons être chahutés sérieusement et que des catastrophes de tous ordres sont probables (nucléaire, bancaire, bactériologique, climatologique ... pour faire référence à mes derniers billets) ET que l'humanité en tirera parti. C'est mon pari sur la résilience humaine. Par contre, pour faire référence à l'article de Paul-Henri Pion (juste en dessous), il ne faudra pas s'attendre à conserver nos "avantages acquis" individuels et collectifs ... la technologie n'est pas magique, les changements seront majeurs et souvent durs. Mais après tout, si des conséquences inattendues sont probables, elles sont par définition encore inconnaissables donc nous verrons bien. Le pire n'est pas certain non plus !

Pour aller plus loin (en anglais)
un article de M. Tenner, 
son site
un article court de Princeton University
et son blog

samedi 25 juin 2011

Solar Odyssey: l'aventure sans combustible embarque

Un mot sur le Salon du Bourget:
Pour poursuivre dans la veine de mon dernier billet, Solar Impulse a retenu beaucoup d'attention médiatique même s'il n'a pas pu voler du fait du mauvais ensoleillement. Preuve que le rêve technologique se poursuit, que les avions attirent toujours les petits garçons et que le solaire intéresse.

De Solar Impulse à Zehst:
Pour certains, Solar Impulse fait penser à l'avion à pédales et prête à sourire. Pour d'autres, c'est le rêve du Progrès qui se poursuit: on n'hésite pas à imaginer le voyage en avion hypersonique Paris-Tokyo en 2h30 en montrant la maquette du Zehst (photo à droite) qui volerait à Mach 4 avec des moteurs d'avion utilisant du kérosène "vert" (issu des algues) et des moteurs de fusée (Oxygène-hydrogène ...donc propres !). Un super Concorde dont les promoteurs regrettent simplement que "le voyage ne soit trop court pour permettre aux voyageurs d'apprécier les plaisirs de la Business Class !" Là vraiment, c'est un rêve que je ne partage plus du tout. Rêve pour les nantis tout au plus et faible utilité économique réelle. Notons cependant qu'il existe aux USA un projet de bombardier hypersonique qui a des chances d'être plus sérieux mais pour d'autres raisons.

Le rêve continue sur la mer
Revenons à l'électrique. J'y avais consacré un billet sur une voiture électrique, la Voltéis que m'avait fait connaître Jean Patrick Teyssaire de Planète Verte Mobilité. La semaine dernière, je parlais donc de Solar Impulse, l'avion. Voici aujourd'hui toujours grâce à Jean Patrick, Solar Odyssey, un trimaran électrique équipé de capteurs solaires et conçu pour traverser l'Atlantique puis faire le tour du monde, un projet porté par une PME Nantaise, Lemer Pax:

Quel est l'intérêt d'un tel projet ?
C'est dit dans la vidéo par Frédéric Dahirel, l'un des hélionautes et co-skipper: plutôt que de vainement sponsoriser la Formule 1 ou les courses à la voile, pourquoi les sponsors ne chercheraient-ils pas plutôt à arrimer leur image à un projet qui fait la promotion d'une transformation discrète majeure: celle des véhicules sans combustible embarqué ? Dit comme cela vous voyez que cela peut donner un peu plus de sens à un jeu qui n'est pour l'heure que d'image. L'idée est en effet comme l'a fait Solar Impulse d'attirer les sponsors pour réussir d'abord à battre le record de la traversée de l'Atlantique puis celui du tour du monde. A noter que j'aurais bien aimé qu'un hybride voile-solaire fût inventé à cette occasion mais cela n'aurait pas permis l'homologation des records. Et puis comme la finalité est la communication, il importait que le concept fût simple. En outre certes, il s'agit de la coque de Foncia, un voilier, mais Solar Odyssée n'a plus de pied de mât, de puits de dérive ni l'envergure nécessaire pour naviguer à la voile. Il a été totalement transformé. Cependant, notez aussi à cette occasion la notion de recyclage !

En quoi sommes-nous concernés ?
Je pense aussi à ceux qui ne croient ni au solaire ni au moteur électrique. Prenons justement un peu de champ: en 1880 Gustave Trouvé faisaient naviguer dans le Bois de Boulogne le premier canot électrique (photo ci-contre à droite tirée du site: www.bateau-électrique.fr).

Plus de 130 ans de développement des moteurs thermiques et comparativement rien ou presque (sauf dans les sous-marins et les tondeuses à gazon...) pour le moteur électrique mobile pourtant plus propre et plus silencieux, pourquoi ? Les moteurs électriques ont toujours souffert d'avoir un fil (électrique) à la patte alors que le moteur thermique pouvait être mobile ... à condition d'embarquer son combustible ! Or justement, les technologies du vent et du soleil ont progressé au point de permettre à l'électrique de devenir mobile. C'est ce qu'ont en commun Solar Impulse et Solar Odyssey. Sans eux, et je crois d'avantage à Solar Odyssey, il ne serait pas possible, dans le jeu médiatique actuel, d'intéresser les "forces vives" à de cette recherche pour l'avenir.
Et c'est promis, la prochaine fois, on parle des nouveaux capteurs fins.

vendredi 17 juin 2011

Solar Impulse: quel rêve pour quelle réalité ?

Quand j'étais petit garçon dans les années soixante (1960s, pas 1860s !), les magazines que j'apercevais montraient souvent des images du progrès technique et scientifique représentées par les avions, et les fusées.  Cela faisait rêver les petits garçons et le monde entier. Certes  dans le même temps, les Mirages israéliens clouaient au sol les aviations syriennes et égyptiennes et les B52 américains noyaient la jungle vietnamienne sous des tonnes de défoliant ... Mais c'était pour la bonne cause et ce qui surnageait alors, c'était que la science et la technique portaient notre Société vers le Progrès ! Deux secteurs économiques symbolisaient ce progrès: le secteur pétrolier et le transport aérien. Chacun mettait ou espérait mettre un peu d'essence dans sa propre voiture pour le dimanche aller se promener à Orly et voir les avions avant de pouvoir  un jour y monter soi-même ... Le rêve et la réalité du progrès grâce au pétrole et au transport aérien ! A l'occasion du prochain salon du Bourget, les media nous présentent maintenant cet avion suisse propulsé à l'électricité produite par les capteurs solaires placés sur la la voilure.

Le rêve toujours mais sans pétrole ... Retour aussi aux images des premiers "plus lourds que l'air". Et si demain, les avions volaient grâce au solaire ? Rêve renouvelé ou illusion ? Déjà le prototype a dû recharger 40% de ses batteries au sol à une prise de courant... Quand on connaît le rendement des capteurs actuels, il est probable que nos longs courriers ne voleront pas ainsi avant longtemps !

C'est pourtant avec Solar Impulse le but que poursuit Bertrand Piccard (photo à droite): boucler un tour du monde sans escale et sans pétrole. Bon vent à lui. Vous pouvez trouver l'un de ses livres ci-après: Une trace dans le ciel

A cette occasion, je voudrais signaler deux débuts de réalité pour peut-être prolonger le rêve de façon tangible.

Vers des solutions relais et une poursuite du rêve:
FIAT, le constructeur automobile vient d'annoncer pour 2012 l'arrivée d'un revêtement fin intégrant des nano-capteurs solaires qui a un double avantage. Tout d'abord, le rendement électrique est sensiblement meilleur que celui des capteurs actuels, ensuite, s'agissant de revêtement fins voire d'une simple peinture, ce système serait peu coûteux à installer artisanalement comme industriellement. Le rêve technologique semble donc se prolonger. Il ne s'agira certainement pas de propulser complètement le véhicule mais de contribuer à recharger un moteur hybride et/ou les équipements électriques embarqués. Un bon début. Il y a encore un an, je croyais cette avancée technologique très éloignée et voilà que l'on commence à annoncer des applications pratiques dans les bâtiments, les véhicules, les appareils électroniques ... Je me propose de faire un billet plus précis sur ces nouvelles technologies très prochainement.

Vers un changement des usages et une forme de renoncement:
Ensuite, quelle est l'évolution prévisible du transport aérien ? La disparition du pétrole n'est peut-être pas pour tout de suite même si nous sommes probablement déjà au "peak oil". Cependant, nous pouvons  constater que le prix à la pompe s'envole et que des surtaxes sont déjà appliquées sur les billets d'avion pour compenser la hausse du prix du kérosène. Il n'y aura donc peut-être pas de grand soir écologique mais une transformation économique discrète: le renchérissement progressif du coût du transport et particulièrement du transport aérien devrait en réduire progressivement l'usage. On pourra certainement encore bombarder Kadhafi pendant deux générations et par ailleurs aller en avion en vacances ou en réunion à l'autre bout de la planète. Il faudra simplement être de plus en plus riche pour cela.

En quoi ceci nous concerne-t-il ?
On peut donc imaginer que les prédictions des économistes de la décroissance se réaliseront ici d'elles-même. Comme on peut prendre ses vacances dans le Cantal et qu'il est déjà largement possible de tenir ses réunions avec Skype sans sortir de son bureau, le voyage aérien a des chances de se limiter plus ou moins rapidement aux usages vraiment essentiels. Il faut donc aussi s'attendre à ce que les industries du tourisme de masse en soit lourdement touchées. Enfin, d'ici-là peut-être les nano-capteurs et d'autres technologies auront alors suffisamment progressé pour proposer des solutions relais c'est-à-dire plus économiques et accessoirement moins coûteuses également pour l'environnement. Il résulte de ces deux évolutions que le rêve reste permis mais que les transformations discrètes en cours annoncent donc A LA FOIS des solutions technologiques possibles mais aussi des remises en cause majeures de la société de consommation et du gaspillage telle que nous la connaissons.

mercredi 1 décembre 2010

Un ordinateur à 10$

Voici une information qui pourrait bien avoir un impact sur les "paradigmes" de la High Tech mondialisée comme on dit parfois. Il s'agit d'un "Ipad-like" low cost diffusé en Inde dans les écoles présenté par le ministre indien de l'éducation. Voici la vidéo:

Cette information est récente (3 mois) mais pas nouvelle. Pourtant, elle me semble importante car elle rejoint plusieurs de mes constats dans les billets précédents sur les lunettes liquides, sur les filtres à eau.... Et si un effet retour se produisait ? Et si l'occident se mettait à acheter non pas seulement ce qu'il délocalise dans le tiers monde mais aussi le produit de son innovation ? En l'état actuel, disposant des moyens d'acheter un Ipad à 500$, et à supposer que cette annonce se confirme, pourquoi nos industries feraient-elles l'effort de nous en fournir un à 10$ ? Mais si nous nous appauvrissions en terme financier par exemple à cause de la gigantesque bulle financière dont parle G. Soros et tous les média ? Une sorte d'effet retour du type du phénomène Dacia dans l'automobile mais avec plus fort impact encore.
A mes yeux, c'est une voie intéressante pour qui voudrait que l'ensemble de la planète vive dignement. Un Ipad à 7€ pourrait être utile dans nos écoles ou à nos chômeurs autant qu'aux écoliers de l'Inde.
Ce type d'initiative est peut-être une réponse
à une question qui m'a été posée à propos de Tim Jackson, :
1) la technologie existe (écran tactile, batteries, capteurs solaires, système d'exploitation Androïd ...)
2) la capacité de production à bas coûts existe à Bangalore ou ailleurs
3) l'hypothèse de prix unitaires décroissants en fonction des volumes se calcule maintenant potentiellement sur des milliards d'unités
4) la logistique et la distribution existent pratiquement partout
5) reste la gestion en occident du "paradigme shift": des produits à très bas coûts pour le plus grand nombre, cela signifierait un énorme progrès dans le tiers monde, peu de recul en terme d'utilisation dans les pays riches mais une baisse importante du revenu moyen par tête.
6) c'est ce changement qu'il sera compliqué à gérer politiquement car il est fondé sur une idée "décroissante". Si cet appareil fait pour 10$ ce qu'un Ipad fait pour 500$, il y a gros à parier que l'un remplaçant l'autre, l'impact sur le PIB sera négatif même si les volumes croissent. Impact d'autant plus fort pour les pays riches que l'on parle ici de PIB mondial qu'il faudra partager avec les pays émergents.
Si un tel pari réussissait pour ce type d'offre, d'autres pourraient voir le jour et c'est tout le rapport de force entre riches et pauvres, Est et Ouest, Nord et Sud qui changerait. Mais si en terme d'utilité nette (et non en terme de revenu par tête) le résultat était probant pour tout le monde, pourquoi pas ?
A bien y réfléchir, si ce que nous partagerions profitait à d'autres sans nous appauvrir trop, les idées de Tim Jackson et de quelques autres pourraient donc peut-être trouver une application pratique.

lundi 29 novembre 2010

Des lunettes liquides !


Voici ce qui me semble être un exemple à suivre dans un monde qui se cherche. 60% des humains ont besoin d'un certain type de correction optique soit pas loin de 4 milliards d'individus.

Hors pays développés et minorités riches du tiers monde, Josh Silver se contente de viser 1 milliard de clients en 2020 !



Josh Silver est un physicien qui devient entrepreneur à force de développer sa paire de lunettes liquides qui s'ajuste à votre vue. Son prototype vaut actuellement 19$ et il n'est guère "à la mode" mais il a l'air de rendre le service attendu.
Voilà encore un problème de développement et de qualité de vie qu'il serait possible de résoudre à l'échelle planétaire. Pas de discours dogmatique, une solution innovante et peu coûteuse . Voici son site: Centre for Vision in the Developing World

Et si par effet retour, cela venait à intéresser ceux qui chez nous n'ont plus de Mutuelle ? Si je conseillais une Mutuelle, je pense que je creuserais le sujet.

samedi 27 novembre 2010

De l'eau propre partout !

Cette courte vidéo de l'ingénieur Michael Pritchard nous présente un système de filtration portable révolutionnaire.

En cas de catastrophe ou dans des zones particulièrement mal pourvues en sources d'eau potable, cet objet peu coûteux permettrait à des centaines de millions de gens de survivre et d'enclencher un cycle de développement positif.

Le procédé permet en effet de filtrer non seulement les plus petites bactéries mais aussi tous les virus. L'eau ainsi produite est donc totalement stérile mais propre à la consommation.