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mardi 7 mai 2013

Des business Angels au Crowdfunding


Toute dernière publication d'Acatl Editions, voici une réflexion originale qui parle business ET société. En ce début de 21ème siècle, l’innovation devient un des principaux vecteurs de compétitivité des entreprises, et des nations elles-mêmes. Notre compétitivité passe donc désormais par la maîtrise des nouveaux processus de financement des startups innovantes ce qui constitue le sujet de ce livre.

L’irruption du « financement participatif », appelé aussi « crowdfunding », nous place face à nos responsabilités quant à notre manière de faire éclore, de retenir et d’attirer des startups innovantes. Ce nouveau mode de financement a pour but de ré-aiguiller l’épargne publique vers l’économie réelle et est déjà mondialisé. Par ailleurs, le grand investisseur dispose de moyens importants et professionnels pour orienter cette innovation selon ses propres critères. Le Business angel classique se trouve ainsi pris en tenaille par des acteurs nouveaux sur une scène élargie. Comment faire en sorte, dans le contexte de la start up innovante, que la Finance s’investisse bien dans l’économie réelle au profit de la collectivité ? Pour l'acheter (vous nous feriez très plaisir), vous pouvez cliquer ci-dessous:


L’auteure est trois fois légitime :

Geneviève Bouché, vous la connaissez, elle était intervenue à TEDxLaDéfense. Elle a créé sa startup. Cette légitimité-là est celle du vécu,
G. Bouché
Elle a été en charge de politiques d’innovation dans la très grande entreprise et poursuit ce travail au plus haut niveau par le biais de diverses associations, think tanks et cercles de Business angels. Cette légitimité-là est celle de la compétence et de la vision,
Enfin, le contenu même de l’ouvrage est le résultat de réflexions communes menée au sein du Club Jade. C’est en tirant parti de sa formation d’universitaire et de futurologue que notre auteure formalise et met en perspective le travail d’un groupe de spécialistes et de nombreuses observations de start up qui resteront confidentielles. Cette légitimité-là est celle de la méthodologie.

Pour en savoir voici le lien vers son blog.

Que vous soyez business angel, dirigeant d’entreprise en création, chargé de projet dans une agence de développement, gérant de fonds ou élu, cet ouvrage devrait vous apporter :
  • Une synthèse opérationnelle des principaux constats à faire sous l’angle pratique d’une situation complexe, mainte fois stigmatisée, jamais vraiment comprise,
  • Une compréhension intime de ce qu’est «l’angelat» aujourd’hui, véritable mutualisation privée du financement de la start up innovante,
  • Une vision claire des tendances en cours à l’échelle internationale et nationale, des défis à relever et des pistes d’actions.

En quoi sommes-nous concernés ?

A n’en pas douter, ce livre est de nature à secouer quelques idées reçues et, espérons-le, à faire naître des vocations ou au moins faire évoluer notre approche de l’entrepreneuriat dédié à l’innovation. Je vous ai déjà parlé du Crowdfunding avec Babyloan et dans "le financement par la foule", rapprocher ce phénomène de l'angelat et de l'entrepreneuriat, c'est peut-être annoncer une vague de fond dans le financement de l'innovation et du renouvellement sociétal auquel au moins 15% de la population pourrait vouloir participer.

"Ca ne marchera jamais"

Je vous ai déjà proposé avec E. Chouard une solution "infaisable" (changer de constitution), en voici une autre "qui ne réussira jamais". C'est entendu, ce serait pour de rire alors ... à moins que ...

dimanche 11 novembre 2012

Trade not Aid 2/2

Suite de l'article de Lucy, étudiante en stage en Inde qui s'occupe de micro-crédit pour faire suite à nos articles sur "Humanisme et Profit".
(Billet invité)

Le nécessaire accompagnement

Je n’ai pris ce recul-là sur l’œuvre de la Grameen qu’en arrivant chez NCRC, où après la mise à disposition de l’argent, est mis en place un processus de suivi des partenaires. Ce processus comprend une réunion du groupe chaque mois, dans laquelle est dispensée une formation sur les bases du management. J’entends bien les bases, car à cette échelle du micro-entrepreneuriat, on revient de très loin: il faut être conscient que la majorité des "locaux" ne sait pas comment on calcule un profit. Ils ne séparent pas l’argent du commerce de celui de la maison. Ils sont ignorants du concept de capital et d’épargne. La relation avec le fournisseur est considérée comme très importante, à la base de tout commerce: un fournisseur doit être un ami, mais le problème qui se pose est alors celui de ses prix. Alors que la négociation avec les clients est une des caractéristiques de l’Inde, celle avec le fournisseur est souvent quasi inexistante. 

Le micro-crédit pour amorcer la relation

Voilà donc, pour moi, une des principales leçons d’NCRC. Le microcrédit, comme on me l’a expliqué dès le début, est d’abord  une base pour engager la relation avec les micro-entrepreneurs. Le but est de les aider à augmenter leurs revenus et plus généralement leur niveau de vie. En plus des formations basiques en management, des formations sur des sujets sociaux et médicaux sont dispensées. Des formations professionnelles sont dispensées par les membres eux-mêmes. Un conseiller en "business development" se déplace également lorsqu’il y a des problèmes difficiles à résoudre. Entrepreneurs du Monde offre un appui technique important en favorisant l’échange de compétences. L’équipe d’NCRC, composée uniquement de locaux et parfois de stagiaires étrangers, reçoit un partenaire d’Edm environ tous les deux mois. Phuong, la responsable Edm des services sociaux économiques d’Asie, m’a expliqué que pour elle, NCRC était un des partenaires les plus avancés dans ce domaine.

Appel à contributions

L’équipe, dont la moyenne d’âge se situe autour des 26 ans, est très dynamique et fait preuve d’une grande capacité d’ouverture, d’une envie d’apprendre. Ici, chaque volontaire ou stagiaire est le bienvenu avec ses compétences. Ses recommandations ou ses idées de projets sont écoutées avec attention par le directeur lui-même.  Il y a également un besoin constant de nouvelles formations dans les domaines précédemment décrits. Vous trouverez des exemples d’appels à compétences dans la rubrique « get involved » sur notre site web www.ncrcindia.org. Bien sûr, le côté financier est également à assurer. NCRC n’a pas encore atteint l’autosuffisance et doit en plus encore engager du personnel. Ici, je retrouve bien le contexte indien tel qu’on me l’avait décrit: le réflexe du financement humanitaire n’est pas encore bien installé dans le pays. Or, l’Occident se retire à grande vitesse de ce domaine, estimant que l’Inde est désormais à même de le prendre en charge. C’est vrai, d’un point de vue théorique et économique. Mais pas encore, hélas, d’un point de vue culturel. Il y aurait au moins besoin de volontaires venant essayer d’assurer la transition, d’éveiller un peu les investissements locaux. Je conclurai en vous souhaitant la bienvenue chez NCRC, si vous passez par Calcutta ! Et bien, sûr, bienvenue aussi aux éventuels échanges à partir de cet article.

Lucie Rosello, www.ncrcindia.org .

En quoi sommes-nous concernés ?

J'ai rencontré de nombreux entrepreneurs solidaires ces derniers temps qui s'ajoutent aux nombreux entrepreneurs "classiques" que je connais, j'ai le sentiment qu'un nouveau cycle naturel s'enclenche. En passant, en Inde ou près de chez nous, par les plus pauvres, les plus simples, une nouvelle version de l'entrepreneuriat prend forme en revenant aux sources, aux besoins de base, aux nécessités. Au passage, se posent les mêmes problèmes que toujours: commerciaux, de gestion, financiers. Et pour les résoudre, une nouvelle forme de capitalisme est en train de naître. S'y ajoute simplement semble-t-il la reconnaissance de l'importance de la relation. Nous retrouvons comme toujours: capital, compétences, savoir, travail et désormais un pilier supplémentaire: la solidarité.

Voilà donc par exemple comment se joue concrètement avec l'histoire de Lucy ce que nous avions abordé cet été sous le thème: "Humanisme et Profit". Nous avions dit nos convictions sur la scène de TEDxLaDéfense, Lucy (une autre "petite poucette")  était dans la salle et depuis, elle l'a vécu. Bravo et bonne continuation à elle.

dimanche 4 novembre 2012

Trade not Aid 1/2

Aujourd'hui la parole est à une étudiante en stage en Inde qui s'occupe de micro-crédit pour faire suite à nos articles sur "Humanisme et Profit".
(Billet invité)

S'adresser à des entrepreneurs

Je suis Lucie, étudiante à Audencia Nantes Ecole de Management, après des classes préparatoires littéraires et une licence de lettres modernes-philosophie. Je viens vous témoigner de mon expérience au Bangladesh et en Inde, au sein de la Grameen Bank et d’une petite ONG soutenant le micro-entrepreneuriat, Navnirman Community Resources Center.

J’ai été  très tôt sensible aux questions de développement. Du concept du commerce équitable, j’ai surtout retenu le fameux slogan « Trade not aid ». Du commerce, non de l’assistance. Donner du pouvoir aux gens, non les maintenir en consommateurs. Voir en eux des entrepreneurs, des artistes, des artisans qui peuvent gagner leur vie et apporter du profit. A partir de là, j’ai voulu partir à la découverte de ceux qui emploient leurs compétences à faire du commerce un instrument de développement.


Renforcer la relation

Mohammed Yunus a donné un coup de pied dans la fourmilière en propulsant le concept du microcrédit. Il a révélé à la face (voilée) du monde, qu’il fallait souvent quelques euros, à peine 3 paquets de cigarettes, à des gens pour monter leur affaire et se relever d’eux-mêmes. Oui, l’argent a bien des pouvoirs… malheureusement entravés par l’un d’entre eux ; celui, l’attrait, qu’il exerce sur nous même. C’est ce que ce professeur d’économie explique : aujourd’hui, on a réduit l’être humain à l’attrait que l’argent exerce sur lui, on en a fait un être unidimensionnel, uniquement préoccupé par le profit. Pour lui, il faut réinvestir les autres dimensions, notamment celle de la relation humaine, celle là même qu’on peut encore deviner dans l’étymologie du mot commerce : « cum », avec, « merx, mercis » des marchandises. Quoi, avec des marchandises ? Un échange, une relation gagnant gagnant ? Mais sur quels plans ?

Appartenir à une communauté solidaire

J’ai passé un mois à découvrir la Grameen Bank et j’ai beaucoup apprécié. Loin d’être de ceux qui la déprécient, je trouve que son œuvre auprès des ruraux est très importante et crée beaucoup de valeur. Néanmoins, il est difficile d’incarner parfaitement un concept tel que celui de Yunus. Et, la Grameen a bien commencé à réintroduire le lien humain dans le commerce: pour emprunter, il faut nécessairement être membre d’un groupe solidaire face aux prêts de chacun de ses membres. Ce groupe se réunit régulièrement et son approbation est requise pour déposer une demande. Mais, s’il y avait une seule critique à faire, ce serait le risque de la réduction de l’aide au simple crédit.


Prospérer

Sans argent, on ne monte pas d’entreprise. La Grameen a commencé à résoudre ce problème. Mais comme chacun sait, il ne suffit pas de créer l’entreprise, il faut ensuite la faire prospérer. Quelles sont les premières causes d’échec de l’entrepreneuriat en France ?  70% sont liées à des problèmes commerciaux, tels ceux d’une mauvaise évaluation du marché, contre 40% liées à des problèmes financiers.



Suite au prochain numéro. Lucie Rosello, www.ncrcindia.org .
 

samedi 27 octobre 2012

Chroniques du défaitisme (3 sur 3) : s'adapter plutôt que se suicider

L'adaptation !
Les analogies tiennent lieu de démonstrations dans un article du Monde qui voulait nous convaincre que l'incapacité politique actuelle à recadrer la Finance conduit inéluctablement au suicide collectif. Ceci est la suite et la fin de ma réponse.

Pour reprendre ces mêmes analogies décodées ici, je trouve, à l'inverse, que l’organisme multi-cellulaire (la Société) cherche actuellement le moyen (dans notre cas, ce ne sera sans doute pas la Justice américaine) de se débarrasser des cellules inadaptées (ici les marchés de produits dérivés). Du coup, il existe aussi une sérieuse possibilité que, dans la perspective de Diamond comme dans celle de Toynbee, notre civilisation trouve à s’adapter. Possibilité à encourager au lieu de promouvoir le défaitisme.

Radotages auto-réalisateurs

Je vous propose donc une autre hypothèse. Et si, à coup de raisonnements faussés, certains dépressifs européens, victimes d’un biais de confirmation cognitif (qu'on appelle aussi « radotage » en langage courant)  ne faisaient qu'accueillir de plus en plus de crédules angoissés dans leur hospice blogosphérisé ? Pire encore, la répétition de leurs raisonnements défaitistes n’est-elle pas le renfort qu’ils offrent gratuitement aux privilégiés qu’ils prétendent combattre ?

Une chose est claire, le parti des défaitismes n'est pas là pour proposer des solutions. Les comparaisons analogiques décortiquées dans le précédent article, linéaires, inspirées par des théories politiques d’hier, des phénomènes biologiques incompris (l'apoptose), des thèses historiques tronquées ou dépassées (Diamond, Toynbee) en resteront probablement au constat juste mais impuissant d’un dysfonctionnement particulier qui annoncerait l'apocalypse du tout. Nous sommes-là dans une boucle dogmatique bien connue depuis Karl Popper dans laquelle il ne faut pas entrer pour rester aptes à  relever nos manches. Prenons garde que le constat défaitiste ne soit pas auto-réalisateur.

Entre temps, nous continuons à financer la dette et à des taux très bas ! Le risque est le même and so what ? Oui, la dette enfle et la mer continue de monter également ... Je crois que le débat sur la crise fournit ainsi à certains le moyen de se distinguer un peu. Mais il est maintenant caduque. Il importe maintenant de préparer activement la suite si nous ne voulons pas être automatiquement condamnés comme les Mayas ou les Vikings du Groenland en leur temps.

Plus sérieux et plus positif

Michel Serres
Si vous aimez les érudits aux cheveux blancs, je vous conseille un véritable philosophe qui ne radote pas malgré son âge. Lisez donc plutôt le dernier petit livre de Michel Serres Petite poucette (voir mon  commentaire ici).  Il met en perspective non seulement les actuelles crises systémiques mais aussi les enjeux structurels du développement global et du respect de l'environnement planétaire. Défis fantastiques que la génération des "petites poucettes" a peut être bien, malgré tout, les moyens et l'envie de relever...  pour peu que l'on ne lui sape pas continuellement le moral en laissant se développer comme des frères siamois inversés mais complices les discours "normaux" ou repliés sur l'identité nationale, d'une part, et les discours "alternatifs", défaitistes et faussement érudits, d'autre part. Il faut vraiment du neuf.

Génération "petite poucette"

Comme Michel Serres, j'ai confiance en la génération des "Petites poucettes" aux réflexes nouveaux pour trouver les moyens de recadrer ce qui doit l'être avec des solutions inédites. Tiens, je vous recommande à nouveau le blog d'une "Petite poucette" qui témoigne dans son article du véritable élan entrepreneurial et solidaire qui anime toute une partie de la jeunesse consciente des problèmes et désireuse d'une action positive et réaliste.

lundi 22 octobre 2012

Chroniques du défaitisme (2 sur 3) : les analogies tronquées ne font pas illusion

Thanks to: read here
Comme les solutions systémiques possibles ne sont pas encore décelables, on nous tient dans un article du Monde un raisonnement "analogique" pour nous convaincre que la Finance se suicide et nous entraîne avec elle. L'auteur, Paul Jorion, essaie de le faire en choisissant des métaphores biologiques puis historiques: il nous parle de  « l'apoptose de la cellule » puis cite Diamond et Toynbee et conclue sur les causes suicidaires de la fin des civilisations... Et à la fin de l'envoi, les fidèles subjugués en concluent qu'ils sont … foutus .

Pourtant, sommes-nous si sûrs que comparaison vaut raison ?

La leçon des analogies tronquées 1: l’apoptose

L’apoptose est bien un phénomène de « suicide programmé de la cellule » comme le dit Paul Jorion, mais il faut lire la définition de wikipédia jusqu’au bout, Paul. Je vous ai trouvé un cours de médicine écrit gros qui vous en dit plus sur l’apoptose si wikipedia est écrit en trop petits caractères :

http://facmed.univ-rennes1.fr/resped//s/biochimie/moleculaire/Apoptose2005-1.pdf

L'apoptose c'est aussi cela d'après cet excellent site
Cette destruction programmée de la cellule en réponse à un signal d’agression a donc diverses fonctions évolutives déterminantes. Paul Jorion choisit, pour les besoins de sa « démonstration », de retenir que l’apoptose est un phénomène actif dans les cancers, les pathologies comme Alzheimer et tout simplement dans le vieillissement. Sans doute aussi peut-on dire de façon analogique que certaines parties de notre société ne sont plus adaptées et doivent céder la place …

Cependant, l’apoptose de la cellule est également au cœur de la sculpture de l’embryon (de la séparation des doigts à la disparation de la queue) et est active tout au long de l’existence, également au cœur de la croissance et du développement de l’organisme multi-cellulaire. (Lire aussi ici) En quoi ce phénomène naturel équilibré serait-il emblématique de la mort plutôt que de la vie ? Pourquoi ne retenir qu’une interprétation délibérément négative en tronquant ainsi des faits scientifiques qui n'ont rien à voir avec la régulation des marchés de produits dérivés ?

Ce que suggère l’analogie mal comprise ou mal intentionnée de P. Jorion est le contraire de l’idée qu’il défend. Si notre Société sait déclencher une apoptose, elle survivra en se transformant ! Le fait que, pour l’instant, on ne régule pas les marchés des produits dérivés serait donc plutôt l’inverse d’une apoptose. Cependant, rien ne dit que d’autres adaptations salvatrices ne sont pas déjà en cours de mise en place.

La leçon des analogies tronquées 2:  Jared Diamond
Jared Diamond, un aperçu ici

Voici ce que dit Paul Jorion de Jared Mason Diamond à propos de son livre: Effondrement: Comment les sociétés décident de leur disparition ou de leur survie ? : « Jared Diamond mentionne parmi les raisons pour lesquelles des civilisations anciennes sont mortes, l’incapacité de leurs élites et de leurs gouvernements à se représenter clairement le processus d’effondrement en cours ou, si elles en ont pris conscience, leur incapacité à le prévenir en raison d’une attitude de défense « court-termiste » de leurs privilèges ».

Pourquoi pas en effet ? Je suis bien d’accord avec le fait que cette affirmation puisse s’appliquer à notre société sous certaines conditions.

Mais pourquoi P. Jorion ne cite-il qu’une partie du travail de Diamond ? En effet, cette citation correspond au constat que fait cet auteur de l’échec des civilisations des vikings du Groenland, des mayas et des Pasquans. Mais pourquoi ne pas aussi citer Jared Diamond quand il signale le succès des Islandais ou des Japonais pourtant affligés de conditions naturelles défavorables ? Ces travaux montrent ce qui se passe quand les élites ne savent pas gérer la situation ET aussi que certaines civilisations ont su s'adapter à des situations précaires.

Quant au lien entre Finance et succès ou échec d'une civilisation, ce n'est vraiment pas le sujet du Pr Diamond, biologiste de formation, évolutionniste de conviction, plus à l'aise avec les chasseurs cueilleurs qu'avec les contrats de "futures" sur les "commodities" ...

La leçon des analogies tronquées 3: Toynbee

Toynbeen en couverture de Time, 1947
Que dire de l'illustre Arnold Joseph Toynbee ? Voici ce qu’en tire Paul Jorion : « Les civilisations ne meurent pas assassinées, a-t-il écrit, elles se suicident ».

Bien court mais pourquoi pas ? La cellule se suiciderait et la civilisation aussi ! Tout ceci aurait l’apparence d'une confirmation académique. Que dit en vérité A J Toynbee ? Il dit quelque chose de beaucoup plus diplomatique que ce que veut comprendre Paul Jorion à savoir : «Quand une civilisation arrive à relever des défis, elle croît. Sinon elle décline. Les civilisations meurent par suicide, non par meurtre» dixit wikipedia. Là encore, Paul Jorion tronque une citation pour ne conserver que ce qui confirme son préjugé.

Toynbee n’est en outre pas si illustre que le dit Paul Jorion. Il a certes  laissé une classification des civilisations qui a servi un temps de référence où le rôle qu'il attribue à la religion a, en outre, été très critiqué. Son oeuvre majeure "A study of History" n'a plus été ré-éditée depuis les années 60, ni en français, ni en anglais.

Dans la réalité et avant ses publications, Toynbee a eu un rôle officiel au Foreign Office. Il a ainsi rencontré Hitler en 1936 puis tenté d'accréditer la thèse selon laquelle les nazis n’avaient de visées expansionnistes que très locales, visées que la Grande Bretagne devait soutenir … thèse qui fut en effet adoptée. Tout le monde peut se tromper, les alliés se sont adaptés !

Peut-être Paul Jorion lui-même se trompe-t-il comme son modèle Toynbee sinon dans son constat du moins dans ses conclusions ? Cela nous laisserait une raison de ne pas passer au Tranxène ni au Python 357 tout de suite. En fait, quand on se donne la peine de remonter le fil des trois "sources" des arguments analogiques défaitistes de Paul Jorion, on se rend compte de leur manque de sérieux. Sa conviction que notre civilisation court à sa perte se fonde sur une réflexion superficielle et tronquée. Cela ne me gène nullement d'ailleurs car jocrisses, tartuffes, millénaristes et illuminés de tous poils ont aussi le droit de s'exprimer. Je pointe seulement ce fait pour rendre plus vigilants ceux qui puisent leurs convictions économiques chez cet auteur.
Quelles preuves ?

Alors, sont-ce là les "preuves" que la Finance se suicide et avec elles notre Civilisation ? La Finance dispose sans nul doute des moyens de se défendre mais que signifient de si faibles démonstrations de la part du Dr Jorion ? Réponse au prochain numéro.

vendredi 19 octobre 2012

Chroniques du défaitisme (1 sur 3) : finance suicidaire et fin du monde ?

Le constat qu'un tribunal de Washington vient d’invalider une mesure de régulation de la Commodity Futures Trading Commission des marchés de produits dérivés serait un signe que la finance se suicide et que notre civilisation court à sa perte. C’est l’hypothèse d'un article de Paul Jorion.

Le tribunal n’a pas résolu la crise !

Oui, certains financiers ont des intérêts à défendre et ils résistent ! Cela vous étonne au pays des lobbies ? Au lieu d’en tirer une conclusion finale, Geneviève Bouché, entrepreneur, auteure et futurologue, propose  à juste titre d’élargir le débat. La finance déraisonne certes mais c’est  toute la Société qui mute. D’autres dysfonctionnements existent que les « produits dérivés »  et d’autres solutions aussi. Geneviève ne dit-elle pas à sa façon polie que quand le sage montre la lune, certains semblent préférer regarder le doigt … ou leur nombril  ? Je partage tout à fait son point de vue quand elle dit : « Ce n’est pas parce qu’un problème est difficile qu’il faut renoncer à le résoudre ». En revanche, encore une fois, la position de P. Jorion m’est étrangère et étrange.

Le fait que l'on ne puisse résoudre le problème des marchés financiers de produits dérivés par une mesure d'ajustement  règlementaire ou juridique est il forcément le signe du suicide de la Finance ? La Finance se résume-t-elle au seul marché de produits dérivés aussi importants soit-il en flux ?  Et s’il fallait de force accepter ce raccourci, ce suicide anticipé annonce-t-il fatalement la fin de notre civilisation ?

Crise systémique et fin de la civilisation ?

Peut-être que oui si, comme Paul Jorion, nous  restons  figés sur l’application des solutions du passé, celles dont on sait déjà qu’elles échouent. Dans ce schéma-là, l'approfondissement de la crise pourrait bien en effet déboucher sur la violence dont le milieu du XXième siècle a donné l'illustration et pourquoi pas sur notre anéantissement total ? Accessoirement, les retraités, qu’ils soient supporters de P. Jorion ou non, ne toucheraient donc pas leurs retraites.  La peur d’aujourd’hui  n’empêchera pas le danger de demain s'il est réel et non fantasmé... Comme dit la maman de Djamel Debouze dans son sketch désormais ancien où est évoquée l'élection de Sarkosy: "quel dommage, demain c'était jour de marché ..."
Peut-être que non, si l'on constate qu'aucune crise systémique ne se règle par de simples ajustements habituels. Les partis politiques « de gouvernements » font semblant de croire qu’un ajustement suffira et Paul Jorion fait semblant de croire que leur échec confirme ses prophéties catastrophiques.  En fait, il n’y a guère à s’étonner, nous sommes mal "barrés" et rien ne confirme non plus le parti pris des défaitistes.

Si la crise est systémique, il faut avoir la liberté d'esprit, le courage et l’énergie de changer de logiciel. Et qui dit que c'est impossible ? Pourquoi faudrait-il avec Paul Jorion en conclure que la seule issue est la mort ? Cela me semble être le seul point de vue étriqué des petits rentiers européens apeurés. Et si, tout au contraire, la crise financière était justement l'occasion de faire un saut de conscience quantique ?  Nous serions alors confrontés à la difficulté de changer de Société sans violence et non forcément à l'anéantissement cataclysmique et inéluctable de notre Civilisation (et donc de la Sécu) ! Les écologistes « résilients » nous apprennent, qu’au naturel, les feux de forêts régulent et régénèrent régulièrement les forêts primaires …

Alors quelles sont les preuves que nous sommes foutus ? Ou bien sont-ce des croyances que colporte Paul Jorion parmi d’autres ? Réponse au prochain article.

samedi 21 juillet 2012

Halla Tomasdottir: doing good business to change the world

Voici le troisième film présenté à TEDxLaDéfense juste avant notre onzième intervention sur scène. On y parle de nouvelle finance telle que celle-ci s'est réinventée en Islande à la suite de la crise des subprimes.

Son angle:

Ancienne cadre sup d'entreprises US, Halla était responsable de la CCI de Reykjavik lors de la crise des subprimes qui a emporté et le système financier local et les hommes politiques qui avaient rendus le pays insolvable. Comme le peuple décida de ne pas rembourser des dettes qu'il ne comprenait pas, il a fait table rase. La côte de risque de l'Icelande a sombré ... et une économie plus saine et plus "sérieuse s'est mise en place. Halla et son associée ont décidé de quitter leurs postes respectifs et de créer un fonds d'investissement fondé sur les valeurs de réalisme ... des femmes islandaises.

Voici la vidéo:



Résumé:

Halla et son associée considèrent que la situation catastrophique de leur pays n'était pas seulement la faute des hommes cependant une trop grande uniformité de valeurs et de pensée masculines leur semble en avoir été une des causes majeure. Leur réaction fut donc de repartir de valeurs qu'elles considèrent être les valeurs traditionnelles des femmes de leur pays à savoir:

1) Comprendre les domaines dans lesquels nous investissons (Risk Awareness): qui a compris dans quoi on investissait au plus fort de la crise des subprimes ?

2) Parler vrai et dire les choses comme elles sont avec des mots simples (Straight Talking). (là j'ai bien envie de me souvenir des paroles lénifiantes de Christine Lagarde (qui "dirige" aujourd'hui le FMI) tout au long des crises financières.

3) Capital Emotionnel: en plus de l'analyse financière sur Exel, il faut aussi prendre en compte le facteur émotionnel. Ce sont en effet les gens qui créent de la valeur pas les feuilles de calcul ...

4) Profits et principes: gagner de l'argent en respectant nos principes ce qui implique de définir le mot "profit" plus largement. Les profits ne sont pas seulement les profits financiers du trimestre mais doivent intégrer des bénéfices sociaux et environnementaux à plus long terme.

Voici en quoi cette approche peut changer les choses:


Halla nous fait part de son espoir que le facteur féminin, plus divers et réaliste dans la prise de décision et la révolution verte peuvent être les bases d'une nouvelle économie pour saine et plus respectueuse. En même temps, elle observe à quel point nous nous précipitons à recréer les conditions mêmes de notre échec. Et elle cite la définition de la folie selon Einstein:
"Faire inlassablement les mêmes erreurs en espérant un résultat différent ..."
Elle nous fait part de ses doutes et aussi de la longue histoire des femmes islandaises qui, depuis les vikings, et jusqu'à la première femme islandaise élue présidente, Vigdis Finnbogadottir, ont influencé profondément leurs époques.

En quoi sommes-nous concernés ?

L'Islande est un cas intéressant. Ce fut le premier pays d'Europe frappé par la crise. Il n'a pas du tout fait ce que nous faisons: le déni n'a pas été longtemps tenable, les banques ont été mises au pas, les politiques ont été remplacés et les créanciers internationaux (anglais et néerlandais) n'ont pas été indemnisés. La côte de risque du pays a donc été dégradée, la récession s'est installée et aujoud'hui l'économie repart sur de nouvelles bases ... Probablement n'y-a-t-il aucun rapport avec nous ... l'Islande c'est tout petit et tout froid alors ? Regardons tout de même, on ne sait jamais !

J'accorde en outre un grand intérêt à cette idée que la diversité "écologique" dans les affaires comme ailleurs est plus efficace que la pensée unique. L'approche féminine (que j'aurais plutôt tendance à appeler de "bon sens") de Halla me semble plus efficace pour éviter les crises qui découlent des biais que Georges Soros pointe de son côté dans la prise de décision financière et économique.

C'est moins l'aspect masculin de l'économie financiarisée qui est dénoncé ici que son côté monolithique, borné, entre soi, conforme et panurgique. Cela devrait nous inspirer car nous sommes atteints du même mal dans nos entreprises, dans les rouages de l'Etat, des collectivités locales et des institutions en général. Comme me le disait un élu local il y a peu dans une petite région de France vide et sans imagination: "en effet, la meilleure alliée du changement auquel nous n'arrivons pas à nous résoudre c'est peut-être cette crise qui nous arrive ..."

Au total, j'ai particulièrement aimé la conclusion de ce "talk" qui a été d'ailleurs comme un fil conducteur de notre journée: ras-le-bol d'une pensée qui opposerait le masculin au féminin, une économie "bonne" parce que philanthropique à de "mauvaises" pratiques qui seraient financières. Il faut aboutir à une unité efficace: une économie saine pour tous: "Humanisme ET profits": 
"doing good business to change the world" !
Les liens:

Retrouvez son site ici: Audur
et un article résumé récent des crises islandaises ici: Le Point

vendredi 20 juillet 2012

Arnaud Poissonnier: vers la banque citoyenne universelle

Le dixième intervenant de TEDxLaDéfense vient du monde de la finance et dirige le deuxième site de micro-crédit sur internet de la planète. Il dit lui-même que c'est encore peu et pourtant la croissance est forte et les perspectives sont prometteuses.

Son angle de vue:

Arnaud est un banquier "dissident" et aussi un pragmatique comme souvent l'aiment à le dire les gens qui savent compter ... Il nous fait part de son expérience dans un domaine en forte croissance et porteur de sens:

Voici la vidéo:


Court résumé:

En tant que dirigeant d'une start up démontrant déjà de belles réussites, notre intervenant témoigne de la difficulté de lever des fonds, les ROI attendus sont désormais de 33% ! Le risque économique perçu par les investisseurs les conduit en effet à être plus restrictifs ... enfin surtout quand il s'agit de financer une entreprise qu'elle soit sociale ou classique !

Il commence à nous expliquer qu'il doit son parcours plutôt brillant, à son côté cancre puis à son intérêt pour le micro-crédit rencontré grâce à l'ONG Actaid. Au passage, notons l'anecdote de Mme Karimov qui reçoit quelques centaines d'euros et ... qui est heureuse de remercier. Le lien toujours le lien ...

Le micro-crédit ...:
90% de la population planétaire n'a aucun accès au crédit.
15% en France pour 50% dans les pays pauvres sont les taux d'adhésion à la création d'entreprise.
Le micro-crédit popularisé par M. Yunus permet la création de la petite activité d'auto-subsistance surtout quand on n'a pas possibilité d'être salarié ... Il représente 65 MM$ d'encours en 30 ans et concerne 200 millions de personnes dont 75% de femmes ... Un triplement est tout à fait possible à court terme.

... auprès du grand public:
Les sources de financement du micro-crédit étaient classiques jusqu'à ce que Kiva ait eu l'idée de solliciter le grand public via internet. Au passage Kiva est un des fellows Ashoka ce qui nous renvoie à l'intervention d'Arnaud Mourot. 160 millions de $ ont été levés et prêtés ainsi par des plateformes de micro-crédit comme Kiva ou Babyloan.com avec une moyenne de 200$ par prêt. Ce représente un quart de pourcent de l'encours mondial du micro-crédit. Kiva se préoccupe moins de la faiblesse actuelle de leur encours que de l'effet réseau à déclencher ... un modèle à la Facebook !

Le micro-crédit est une des briques de la finance d'un possible nouveau monde. Une brique qui double de taille tous les 18 mois et qui s'appuie sur les nouveaux modèles que permettent l'internet en bypassant la banque traditionnelle qui de toutes façon délaisse 90% du marché planétaire disponible. C'est ce qu'Arnaud nomme la Banque Citoyenne Universelle qui, en plus, rend les bénéficiaires plus heureux !
Image tirée du site de Babyloan.com
 En quoi sommes-nous concernés ?

Tout d'abord, si vous désirez réaliser de petits investissements rémunérés et utiles, voilà une piste citoyenne. Sachez au passage que le taux de défaut du micro-crédit est plus faible que celui des prêts bancaires classiques ... plutôt sympathique à savoir par les temps qui courent ... en attendant les premiers défauts de nos banques bien établies.

Ensuite, pour les jeunes "nantis" nourris aux réseaux sociaux et désireux de participer à des actions de développement, voici un véhicule à étudier.

Enfin, votre entreprise ou votre collectivité locale peuvent s'associer à une plateforme comme celle-ci pour développer un engagement citoyen de ses cadres et employés ou un système "glocal" de co-financement. En effet, une entreprise qui souhaiterait promouvoir des actions réellement citoyennes et solidaires peut se rapprocher de Babyloan et monter ses propres actions. Et dans l'autre sens, pourquoi financer des projets seulement loin de chez nous. Babyloan peut également s'appuyer sur une ONG locale en France pour favoriser des investissements dans des projets dans tel ou tel territoire français qui en aurait besoin .... c'est toujours ce qu'elle fait à Manille ou Arusha ...

Retrouvez son blog: http://blog.lefigaro.fr/babyloan/arnaud-poissonnier.html
et le site de Babyloan: http://www.babyloan.org/fr/

La goutte d'eau dans un océan bleu:

Lorsque nous avons préparé ce "talk", Arnaud m'a parlé de cette image de l'océan bleu par opposition à l'océan rouge. Le premier symbolise le monde nouveau, à créer. Le rouge c'est celui, surpeuplé, de l'hyper-compétition. Alors, le choix de cet ancien grand banquier a été d'aller nager dans les eaux où personne ne va. 90% de la population n'a pas accès à la banque et cela veut-il dire que cette humanité-là ne pourrait pas faire bon usage d'un peu de cash ? Or pour ces démunis, il n'y avait pas d'offre. Le micro-crédit est une goutte d'eau dans la finance mondiale et le micro-crédit via le net est une goutte d'eau dans la goutte d'eau. Mais c'est de l'eau bleue, le champ est libre ... Les perspectives de croissances sont énormes.

Il s'agit d'une brique, là-encore, une solution à côté de quelques autres qui commencent à nous faire imaginer qu'une autre croissance est non seulement possible mais absolument nécessaire. Il s'agit aussi d'une illustration de ce que peut être l'économie "inclusive" c'est-à-dire s'intéressant à inclure les plus pauvres. Là, le saut quantique est permis par l'internet qui relie directement les emprunteurs via les ONG locales et le citoyen-investisseur. Nous verrons avec la prochaine conférence, celle d'Isabelle Raugel, d'autres illustrations et surtout qu'il s'agit probablement du surgissement d'une autre forme de Business Models.

dimanche 15 juillet 2012

Arnaud Mourot: Les chaînes de valeur hybrides

Notre neuvième intervention de TEDxLaDéfense nous fait entrer directement dans le monde des entrepreneurs sociaux. Arnaud Mourot dirige Ashoka pour l'Europe francophone et également l'ONG Sports sans frontières.

Son angle:

Arnaud est dirigeant d'ONG, entrepreneur social et ancien sportif de haut niveau. Il finance le développement de projets d'entrepreneuriat social se présentant comme capital investisseur philanthropique.


Eléments clefs présentés:

Rôle d'Ashoka: historiquement il s'agissait de financer des projets d'entreprises sociales dans des pays comme l'Inde, le Brésil ... Que faire en France où l'on considère que ces "débutances" doivent être aidées par le régalien et non par la société civile ? Il fallait essayer en trouvant un premier entrepreneur.

Site de SIEL Bleu
Le tout premier entrepreneur en France: en 1997 à Strasbourg,  Jean-Daniel Muller et Jean-Michel Ricard veulent s'occuper des personnes âgées, développer les activités physiques des seniors pour les sortir de situations de dépendances ... SIEL Bleu fait économiser des milliards à la Société par la prévention des chutes des personnes âgées. Cette ONG compte désormais 300 personnes, touche 80000 personnes par semaine et divise par 2 ou 3 le risque de fractures. Appliqué à la réduction des fractures et au diabète de type 2, Arnaud nous dit qu'une étude évalue à 56 milliards l'économie en 9 ans que permet ce modèle ...

La question qui se pose aujourd'hui: alors que ce type d'accompagnement aide peut-être 200 ou 300 millions de personnes dans le monde (la cible est de 4 milliards), comment accélérer le processus ? Comment aussi permettre aux entrepreneurs sociaux de franchir les plafonds de verre et d'atteindre la taille que leur modèle permet ? Un besoin immense reste encore à servir:

Slide d'Ashoka tirée de la présentation d'Arnaud

Le levier, c'est le business: différents leviers existent, Arnaud choisit de mettre l'accent sur celui du "Business" car c'est là que se trouvent les process, les moyens. Il faut combler le vide entre l'univers des entrepreneurs sociaux qui savent adresser tous ces "nouveaux clients" et le "Business" qui en a les moyens. Car il s'agit de voir ces publics comme des clients et non comme des assistés et leur proposer des offres adaptées: c'est l'idée de l'hybridation des chaînes de valeur:

Slide d'Ashoka tirée de la présentation d'Arnaud

En quoi sommes-nous concernés ?

Arnaud n'a pas besoin d'être paraphrasé. Le besoin est là, le phénomène de convergence est amorcé. Il s'agit de l'accélérer car le temps qui nous reste est court. Le monde de l'entreprise n'est pas celui d'une morale ou d'une sensibilité humaine. Il est celui de l'action.

Nous avons l'opportunité véritable de faire converger "humanisme" et "profits", c'est-à-dire tout simplement réorganiser les priorités du monde économique en tenant compte des besoins de la société (globale qui plus est) non pas parce que c'est seulement "bien" mais parce que c'est ce qu'il faut faire: le marché existe et le savoir-faire et les moyens pour répondre à ses besoins existe .... Ou nous avons aussi le choix de gloser sur les vieilles lunes ou nos privilèges amoindris....

Voici, en tous cas, un message fort et clair en faveur à la fois des plus démunis ET des entrepreneurs.

samedi 7 juillet 2012

Etienne Hayem: la monnaie comme lien !

Et voici le septième intervenant de TEDxlaDéfense. La monnaie, complémentaire,  comme moyen de créer et de densifier les liens quand l'économie déraisonne selon Etienne Hayem. Ce fut un moment d'émotion car la salle a ressenti que malgré son jeune âge, le benjamin de notre TEDx capitalisait beaucoup de vécu.


Voici la vidéo:


Le rêve:

Etienne nous a fait part de l'importance qu'avait eu pour lui TED puis il nous a raconté son rêve de gosse. Dans ce rêve d'enfant, il comprend qu'il ne sert à rien de braquer une banque, d'avoir de l'argent et même d'avoir tout ce que l'on veut ... si l'on est seul en fin de compte à pouvoir en profiter. Dans son rêve, Etienne peut aussi réveiller qui il veut et le voilà parti, devenu grand, dans ce qu'il appelle une "quête d'abondance" où la richesse n'est pas dans la monnaie mais dans le lien et le partage qu'elle permet. La finalité prime sur le moyen.

Voici ce qu'il dit de son expérience avec nous dans son blog.

Au passage une citation:
"Ils ont échoué parce qu’ils n’ont pas commencé par le rêve'" . Etienne ne la reprend pas mais moi si, à la marge d'abord parce que je n'ai pas réussi à convaincre mes collègues d'adopter dans une mission de conseil un language direct et une option ambitieuse, il n'y a pas pire dormeur que celui qui ne veut pas se réveiller. Et pour le fun ensuite parce que François Hollande l'a reprise dans un discours en Janvier 2012 en se trompant car il l'a attribuée à William Shakespeare alors qu'elle est de l'un de ses lointains descendants contemporains journaliste au "Telegraph" de Londres !

Le message:

Tout commence donc pour Etienne par un voyage d'étude au Mexique puis en Argentine. Il y côtoie des "vrais humains" appauvris, marginalisés voire désocialisés du fait de l'explosion de leur dette et de leur incapacité à rembourser comme son ami et mentor Manolo. Impact des crises qui ne sont pas l'exception mais la règle et des intérêts composés qui seraient "la plus grande force qui existe" ! Qu'il s'agisse de la dette immobilière de Manolo ou de la dette souveraine des Etats, la force des intérêts composés et l'impact des crises à répétition semblent en effet impossible à contre-carrer...

Et pourquoi ? Et si le système financier et monétaire était simplement mal conçu ? Et s'il s'agissait de se réveiller pour ne plus courir après l'argent mais utiliser l'argent dans toute sa dimension de création de valeur par le lien ?

Facile à dire mais quand on n'a plus d'argent du tout comment échanger ? C'est justement l'intérêt des monnaies complémentaires.

Je vous renvoie à un article que j'avais déjà écrit sur Etienne et sur les monnaies complémentaires, ici.

Je ne sais pas si Etienne a "réveillé" nos visiteurs mais il n'a certainement pas laissé la salle indifférente.

En quoi sommes-nous concernés ?

Concernés par les crises, nous sommes menacés des mêmes dangers que Manolo. Je retiens en outre cette idée de résilience monétaire qui nécessite une certaine diversité de moyens d'échanger (monnaies) qui renvoie à des articles que j'avais écrits pour traiter de résilience en écologie ici, ici et ici.

Etienne reprend sur ce point les théories de Bernard Liétard. N'avoir qu'une seule monnaie ou seulement quelques monnaies internationales renforcerait l'asphyxie monétaire des classes moyennes pendant les crises. Avoir une pléthore de monnaies locales ne serait guère mieux qu'un système peu efficient de troc. En revanche disposer en plus des grandes monnaies de monnaies complémentaires  solides permettrait de créer pour les précaires et pour les autres un surcroît de richesses et de lien social.

jeudi 5 juillet 2012

Stéphanie Boulay: management éthique

Sixième intervention de TEDxLaDéfense, Stéphanie Boulay parle de management éthique à partir de son expérience de la banque dans l'optique de cette seconde session consacrée aux "apaisements".

L'angle de Stéphanie Boulay:

La Banque lui a tout d’abord permis de percevoir les interactions entre finance et économie puis, en tant que manager, de rapidement prendre conscience de l’importance de la qualité d’expérience de ses collaborateurs sur la qualité de leur travail et de leur implication. Elle a alors cherché à améliorer son savoir-être, source de toute qualité ou non qualité, qu’elle soit managériale ou autre. Le Leadership Ethique lui a fait prendre la pleine mesure de l’impact du système financier sur notre économie, des sommes en jeu et de la qualité ou de la non-qualité massive qui découle des choix des investisseurs, quels qu’ils soient.

Voici la vidéo:


Les clefs de ce talk:

Pour Stéphanie, tout commence avec le blanchiment d'argent qui représentait 15% des flux transitant par ses équipes. Cela signifiait drogue, trafics d'armes, prostitution et quand il s'est agi pour elle de participer dans sa banque à un grand projet sur le management éthique, elle a réalisé qu'il était question, en vérité, d'une façade et non d'un engagement de fond. Elle a donc quitté la finance pour étudier puis former au leadership éthique.

L'exemple par l'absurde de la crise des subprimes

Prêts immobiliers aux plus modestes fondés sur deux espoirs déçus à savoir que les taux variables peuvent ne pas rester bas et ensuite que le marché immobilier peut aussi se retourner. Les risques associés ont été disséminés sur la planète par les "dérivés de crédits".
  • Actifs toxiques en lien avec les subprimes: 800 milliards de $,
  • Dettes contractées par les Etats pour aider les banques: 2800 milliards de $,
  • Pertes en capitalisation boursière: 30 000 50 000 milliards de $
  • Coût humain: 3,5 millions de familles perdent leur toit, 600000 emplois détruits.
L'urgence de la survie: coûts annuels au niveau planétaire
  • Traitement de la malnutrition sévère: 3 milliards de $,
  • Faim dans le monde: 30 milliards de $,
  • Accès à l'eau potable: investissement unique de 200 milliards de $.
Ces quelques éléments montrent qu'à l'échelle globale, un gâchis et une grande disproportion existent montrant que les priorités d'actions éthiquement correctes ne sont pas prises.

A l'intérieur des organisations, puisqu'il s'agit en Management Ethique de commencer à agir là où l'on est et où on peut le faire, le BIT estime à 3 à 4% du PIB les pertes en non-qualité liées au stress sans parler des coûts du manque de confiance, de la résignation, des conflits ouverts ou larvés, du manque d'initiative et de créativité ...

Conjuguer Humanisme et Profits en particulier dans une banque, c'est réaliser à quel point la seule démarche rationnelle et humaine consiste à remettre l'Humain au coeur de l'économie.

En quoi sommes-nous concernés ?

Stéphanie nous souhaite à tous de tenter l'aventure et de tous devenir des leaders éthiques en commençant par résoudre les problèmes du quotidien pour participer à la résolution des absurdités globales.

Stéphanie est venue compléter le sujet de Spiros Risopoulos en le généralisant. Lors de la constitution de notre programme, nous avons été frappés par la convergence de ces deux sujets. Et pourtant, ils ont des perspectives et des origines fort différentes.

mardi 3 juillet 2012

Mario Capraro: un polar pour penser l'impensable

Ceci est le troisième article de notre série TEDxLaDéfense. Déjà présenté dans ce blog Mario Capraro, nous parle de la crise de la dette de la façon la plus simple, la plus agréable et aussi la plus impertinente et pertinente qui soit.

Nous avions le choix, travailler dans le sens des banquiers et creuser l'explication pour donner du crédit au déni ou poursuivre dans le sens de Jean-david Haddad et finalement risquer de verser dans le catastrophisme. Nous ne voulions ni de l'un ni de l'autre ...

Pourquoi le roman policier ?

Hé bien vous le voyez ici dès le début de la vidéo:


Mario pose le problème: la dette. Mais il nous met au parfum tout de suite, il en joue. Les banquiers, il va les tuer et  aussi les économistes creux qui ne savent donner aucune solution claire ! Ce parti pris de romancier est merveilleux car il restitue le temps d'un roman au lecteur comme à l'écrivain ce qu'il n'aurait jamais dû perdre: le pouvoir ! Les banquiers nous gênent, il les tue ! Et s'il s'avère qu'en réalité le problème le plus gênant est la dette elle-même bien plus que le banquier, il la tue aussi ... 

Sous le sourire, une remarque non dite, une solution dont l'évidence devrait nous sauter aux yeux et qu'il faudrait vraisemblablement évoquer de face: ne pas payer les intérêts, voire ne pas rembourser du tout. Est-ce envisageable ? Nous verrons dans un prochain article que cela s'est fait en Icelande. en attendant, cela s'est souvent fait dans l'histoire, lorsqu'un roi ne pouvait plus rembourser, il supprimait le créancier ! Le dernier livre de Mario ici nous l'explique précisément.

Le roman est donc un outil commode pour penser l'impensable.Et en plus, on ne s'y ennuie pas et on comprend tout !

Les ingrédients du polars:

Finalement, l'écrivain procède comme un manager, il enquête et répond à quelques questions de base:

Le crime ? Y-a-t-il crime ? C’est quoi le crime.
Le mobile ? Quel enjeu ?
Les auteurs du crime ? Le, les criminels ? Qui, quoi ?
L’intrigue ? « Combinaisons de circonstances et d’incidents, enchaînement d’événements qui forment le nœud de l’action. Et quels rebondissements ? Comment se sont-ils pris ?
L’enquêteur ? Celui qui va révéler toute l’histoire et qui va nous amener jusqu’à la résolution, la délivrance, le dénouement. Voyons comment sortir de la crise.
Le dénouement ? La meilleur façon de comprendre tout ce qui précède et notamment les causes du crime et, peut-être, la manière de l’éviter.

La morale ?

Notez au passage l'interrogation habituelle. Qui est le bon ? Le héros qui enquête sur les meurtres bien sûr. Et le méchant ? Finalement une incertitude demeure. Est-ce celui qui propose la solution impensable ou ne serait-ce pas plutôt ceux qui ont mis leurs pays à force d'aveuglement et de déni dans une situation impossible ?

L'impensable est d'autant plus facile à penser que l'histoire est là pour nous montrer que l'impensable est arrivé souvent ! Du coup, on peut prendre les parallèles osés de Mario comme une aimable plaisanterie ou au contraire y voir une allusion à peine voilée.

Qui est l'intervenant ?

Il n'est pas banquier mais tous ses romans se passent dans ou autour de l'entreprise et ce n'est pas un hasard. Actuellement intervenant à l’Université de Lyon I, à l'INSA de Lyon, à l'ISEG Lyon, au DIU de Psychocriminalistique, il est né en 1946 à Brindisi, Italie et arrivé en France à l’âge de 22 ans avec un CAP de mécanique, un Bac technique et 10 francs en poche.

Après un début comme ouvrier, puis technicien et un passage dans le conseil, il a dirigé des PME indépendantes, une grande filiale d’un groupe, créé sa propre entreprise et assuré  au sein d’une organisation patronale la conception, le développement et la mise en œuvre  de plusieurs programmes de développement industriel territorial ayant impliqué plus de mille PME en France.

Ses livres:

Le Cercle des Lombards: il est la référence de la conférence ci-dessus et nous plonge à la fois dans l'Italie de la renaissance et le Lyon des cyber-pirates.

Le Pacte des Grands Rois: je l'ai lu dans l'avion l'autre week end et il nous entraîne à la fois dans la Chine du 17ième siècle et d'aujourd'hui et dans l'univers des black hackers autour de l'archivage numérique.

J'ai beaucoup aimé ces romans dont je connaissais de nombreux décors et certains enjeux. On ne s'ennuie pas une seconde.

En quoi sommes-nous concernés ?

Le roman est un gisement de signaux faibles nous dit Mario. Il a entrepris son enquête il y a près de deux ans maintenant. Autant dire qu'il avait vu bien des choses bien mieux que beaucoup dont c'est le métier ! Alors nous avons choisi de lui faire parler de l'impensable qui devient de plus en plus probable et de le faire avec le sourire en se disant que nous devrions nous voir nous mêmes comme les vrais héros de l'histoire et comme le romancier lui-même. Nous devrions nous voir comme ceux qui vont décider de leur propre avenir !