samedi 26 mai 2012

Le "social business" selon le Professeur Yunus et danone.communities

Merci à Didier de m’offrir la primeur des articles-invité de son blog. Je visite « Le dire et le faire » depuis ses débuts et ai déjà participé à la discussion via des commentaires. Aujourd’hui, je voudrais vous faire partager les réflexions que m’a inspirées une conférence à laquelle j’ai assisté le 15 mai dernier à la Maison de la Mutualité à Paris.

http://www.flickr.com/photos/danone-communities/7249189814/

La conférence

Cette conférence a été organisée par danone.communities, l’incubateur d’entreprises dans le domaine du social business de Danone, pour fêter ses 5 ans d’existence. L’invité principal en était le Professeur Muhammad Yunus, fondateur de la Grameen Bank et Prix Nobel de la Paix en 2006. Au programme, après un début en retard qui a été l’occasion de constater la motivation des 2000 participants dans la file d’attente :
  • En introduction, l’état des lieux des projets de danone.communitiesAutour d’une table ronde, les grands enseignements tirés par les gérants des projets les plus aboutis de danone.communities : Grameen Danone Foods Ltd., les Shokti Ladies, 1001 Fontaines pour demain, Naandi Foundation et La Laiterie du Berger
  • Le témoignage d’une demi-douzaine d’entrepreneurs sociaux partout dans le monde
  • Un éclairage sur le social business en France
  • Enfin, sous la forme humoristique d’une interview de Muhammad Yunus par Franck Riboud, Président Directeur Général de Danone, un retour sur la genèse et le développement de la Grameen Danone Foods Ltd.
A la suite de la conférence, un cocktail était organisé à l’étage pour permettre aux participants de rencontrer les différents entrepreneurs sociaux présents sur leurs stands et d’échanger entre eux.

Ce qui m’a frappée

Au-delà du rythme excellent de la conférence, de la richesse des retours d’expérience des différents intervenants et de la simplicité du langage tenu, ce qui m’a frappée dans cette conférence a été l’accent mis sur la question d’être « en accord avec soi-même », sur la nécessité de faire parfois des choix pas exactement rationnels car « après tout » ils ne mettront pas à eux seuls en cause la pérennité de nos activités, sur l’importance à certains moments-clé de faire les choses simplement parce qu’on y croit.

Franck Riboud, ainsi qu’il le raconte, a voulu « être copain » avec Muhammad Yunus et a fait ce qu’il fallait pour : le harceler par courrier pour le rencontrer, lui apprendre que pour aller du Bengladesh à Deauville, on passait nécessairement par Paris et enfin, être tellement d’accord avec le Pr. Yunus qu’il en est venu à se demander si Franck Riboud comprenait bien son anglais.

 

Ce dernier a voulu pousser plus loin et explorer les possibilités qu’ils avaient de travailler ensemble. La Grameen Danone Foods Ltd. s’est élaborée et réalisée à ce moment-là. Malgré les questions de la presse à l’époque sur qui utilisait qui, la Grameen Danone sert aujourd’hui surtout à améliorer la nutrition et le développement des enfants au Bengladesh grâce à un yaourt fortifié en micronutriments et à réduire la pauvreté en incluant les communautés locales dans la chaîne de valeur.

En quoi cela nous concerne-t-il ? 

1) Le social business, c’est en France aussi. Comme l’action humanitaire, il peut trouver son terrain d’action en bas de chez soi dans des activités permettant la réinsertion de personnes marginalisées, l’aide aux plus démunis, l’accès aux soins de santé pour nos seniors, l’alimentation des nourrissons dans les familles vivant sous le seuil de pauvreté, etc.

2) Puisque notre vie professionnelle nous prend beaucoup de temps et d’énergie, pourquoi ne pas faire en sorte qu’elle aille au-delà de la production de richesse économique ? Pourquoi ne pas lui donner du / encore plus de sens et donner à nos compétences un levier d’action plus grand ? A l’inverse des actions humanitaires principalement soutenues par les subventions, les dons et le bénévolat, un « social business » est conçu comme une entreprise classique : avec des produits et services, des clients, des fournisseurs, des marchés, des charges et un chiffre d’affaires. La seule différence avec un « business tout court », c’est qu’il remplace la dimension de maximisation du profit par celle du bénéfice social et les profits réalisés par l’entreprise ont vocation à y être réinvestis pour assurer son développement.

L’élément de sérendipité du jour

La sérendipité, comme elle a été présentée dans l’article Edward Tenner : les conséquences inattendues de l’innovation, est la capacité et le fait de découvrir des choses auxquelles on ne s’attendait pas. A cette conférence, j’ai vu mise en œuvre une technique que j’ai découverte il y a bien longtemps dans un documentaire et que je n’avais jamais rencontrée dans la « vraie » vie.

La conférence était selon les moments et les intervenants en français ou en anglais et nécessitait une traduction en temps réel. Pas d’interprète sur scène pour traduire les discours au fur et à mesure, ce qui aurait rendu la conférence unilingue et pas de traduction par casque puisque la salle n’était pas équipée pour cela. La conférence a donc été sous-titrée, tout du long, sur les écrans latéraux qui affichaient également les images filmées des intervenants sur scène. Lorsque l’intervenant s’exprimait en français, un traducteur produisait les sous-titres en anglais et lorsque l’intervenant s’exprimait en anglais, un traducteur anglais-français prenait le relais.

Le sous-titrage, même s’il était soumis aux aléas du direct, a rempli son rôle et permis à chacun de suivre la conférence dans la langue qu’il maîtrisait le mieux, voire dans les deux langues.

En quoi cela nous concerne-t-il ? Voilà une technique efficace à garder à l’esprit pour tous ceux qui rencontreront des problématiques semblables dans l’organisation d’évènements dans un monde de plus en plus interconnecté où l’on ne peut plus accepter que les langues soient une barrière au partage d’un discours ou d’une idée.

Hanashi

jeudi 24 mai 2012

Planter: les jardins du Ruisseau

C'est le printemps, changeons de sujet. Voici une expérience de jardins urbains collectifs menée tout près de mon quartier parisien.

L'association des amis des Jardins du Ruisseau occupe en effet dans le 18ième,  depuis 1998, une des berges de l'ancien chemin de fer de petite ceinture sur environ 500 mètres.

Voyez sur les photos ci-dessous l'allure générale de ces jardins d'agrément et potagers. On y accède par l'une des portes situées sur les ponts routiers qui enjambent la voie ferrée en dessous.

Cette ancienne ligne de chemin de fer est longue de 23 kilomètres. on voit l'intérêt que l'on pourrait en tirer si ce type d'initiative venait à se développer. D'un côté en France, une surface équivalente à un département français moyen disparaît chaque 10 ans au profit du béton des infrastructures urbaines et de transport. De l'autre, en 14 ans 500 mètres sur 23 kilomètres de ce chemin de fer parisien devenu obsolète sont devenus des jardins ...

C'est bien déséquilibré et pourtant, l'autre Dimanche, quand nous sommes allés nous promener dans le quartier, il faisait soleil et certains "locaux" semblaient en profiter:

Galerie de photos

samedi 12 mai 2012

Investir 1: le financement par la foule

La finance participative met en relation porteurs de projets et investisseurs via des plateformes internet. Depuis peu, le "crowdfunding" ou "crowd financing" a (relativement) le vend en poupe. Il concerne aussi bien la recherche de capitaux, l'emprunt et le micro-crédit que le don.

Prenons ce petit film consacré par Frenchweb à Jean-Christophe Capelli, dirigeant de la première plateforme française de financement participatif. Il vous en explique les bases et aussi les vicissitudes:


Vous retrouverez son site ici: Friendsclear.

Comment ça marche ?
  
Je ne résiste au plaisir de vous présenter cette autre vidéo pour répondre à la question (en anglais). Il s'agit de la vidéo d'explication d'une nouvelle plateforme qui intègre une originalité sur la côte de risque de l'emprunteur:


Voici le site en construction de banktothefuture.

Le circuit court de l'argent: la plateforme internet permet de rapprocher les investisseurs et les porteurs de projets. Tous les systèmes financiers peuvent fonctionner ainsi: dons, micro-crédit comme sur Babyloan (je vous présenterai cette plateforme en détails bientôt), crédit comme ici ou même Capital (Equity).
Des projets que les gens comprennent: de l'autre côté, ce sont les entrepreneurs eux-mêmes qui présentent leurs projets. L'investisseur choisit dans la sélection de la plateforme.
Une analyse du risque originale: dans le cas de banktothefuture, il y a une originalité, la côte de risque du projet tient compte du comportement du porteur de projet sur le net, de sa "e-réputation".
(Je complèterai ultérieurement dans un article dédié car tout n'est pas dans tout, il convient d'affiner)

Rapide panorama des "business models":

Il existe plusieurs typologies. Il y a des sites visant prioritairement le financement solidaire comme Babyloan. D'autres sont destinés à des investisseurs qui souhaitent un bon rapport comme dans le cas de Friendsclear.

J'ajouterais bien ici une conviction personnelle ancienne. Il me semble que la frontière est assez ténue entre le capitalisme solidaire et le capitalisme tout court. Il est bon que l'on puisse aider. L'intérêt "altruiste" de celui qui aide trouve un accomplissement. Dans le cas d'un prêt rémunéré, son intérêt financier aussi. Le preneur s'endette raisonnablement pour créer de l'activité en commençant par la sienne et en retire également un intérêt financier. N'est-ce pas le schéma théorique idéal ? Un schéma d'ailleurs plus durable car il n'est pas nécessaire que le prêteur soit préalablement suffisamment riche pour ne pas avoir besoin de se rémunérer. Nous sommes dans ce cas de figure avec le "crowd financing": tout à la fois dans le mutualisme, le capitalisme ET la solidarité. Au passage, rappelons-nous que plusieurs de nos plus grandes banques ont commencé exactement comme cela ! N'est-ce pas finalement un simple retour aux bases facilité par la technologie ?

Il y a des plateformes spécialisées dans des secteurs comme la production musicale (ex: mymajorcompany.com), cinématographique (Tous Coprod) ou photographique ou d'événements théatraux....D'autres sont plus généralistes. certaines sont orientées net-économie d'autres, vers l'économie "réelle".

En France environ 25 plates-formes de crowdfunding ont vu le jour. En voici quelques-unes: Wiseed, Ulule, Kiss Kiss Bank Bank. Depuis 2008, 35.000 internautes ont financé près de 15.000 projets, pour un montant total de l'ordre de six millions d'euros. Le taux d'intérêt brut des prêts classiques est de l'ordre de 5% taxé à 37,5% ...

En quoi sommes-nous concernés ?

Si vous n'avez pas d'argent à placer et pas de projet ... eh bien ça vous concerne aussi, car il n'est pas de fonctionnement économique possible sans financement efficace et nous avons-là peut-être une piste d'avenir ...

1) Il s'agit-là de nouveautés ne comptant encore pour presque rien dans la masse des financements. Pourtant, la chose intéresse les grandes structures comme Renault (Zesto) et le Crédit Mutuel de l'Ouest qui auraient pillé le projet de Friendsclear. Cela intéresse les banques et les pouvoirs publics qui règlementent férocement ... on ne sait jamais peut-être pourrait-il y avoir dans ces start ups des escrocs qui pourraient spolier les épargnants ... quand le système actuel, lui, ne fait courir de risque à personne (sauf à la totalité des contribuables peut-être) !

2) Dans l'économie fortement dépressive dans laquelle nous sommes entrés, ces nouvelles pousses pourraient devenir des auxiliaires précieuses surtout si l'on savait les rapprocher par exemple de territoires à la recherche à la fois de projets et de fonds et où les élus comprendrait que le temps de l'économie administrée ou celui du tout-marché sont peut être remplacé par celui du réseau. Ces plateformes n'ont rien de localisé cependant leur exemple pourrait ouvrir des perspectives à des groupements d'entreprises ayant à coeur de développer leur bassin d'emploi ou une filière par exemple.

3) De telles initiatives de financement peuvent en outre parfaitement se rapprocher des monnaies communautaires déjà évoquées dans des billets précédents. J'ai déjà mentionné que monnaies communautaires et financements directs peuvent être associés comme par exemple dans les favellas de Fortaleza au Brésil. Avec le "Crowdfunding" nous avons un plus qui est la technologie. Il est en effet essentiel de gérer précisément (et bien plus efficacement qu'avec les lourds systèmes bancaires existants) les comptes et les transactions.  La technologie "2.0" (réseau social) permet en outre une mise en relation facile et peu coûteuse. Il peut en résulter pour le porteur de projet un accès plus simple et moins coûteux au financement. Une meilleure et plus rapide analyse du risque permet de mieux rémunérer l'épargnant tout en lui laissant le choix et en le responsabilisant. Elle peut s'associer à une monnaie alternative. L'ensemble peut renforcer les relations d'affaires et les relations tout court entre ses membres au sein d'une communauté comme nous l'avons vu avec le WIR.

4) Enfin, le financement participatif reproduit le fonctionnement bancaire tel que 99,9% des gens pensent qu'il fonctionne. En fait, alors que les banques utilisent en réalité un système de multiplicateur dérivant du système de réserve fractionnelle qui conduit effectivement à de la création monétaire sans contrepartie réelle (dans un rapport moyen théorique de 1 à 9), ces plateformes ne "créent" pas d'argent. L'argent passe directement d'un investisseur à un entrepreneur sans aucun effet multiplicateur. Elles ne contribuent à la dérive financière observée actuellement.

5) C'est peut-être un moyen alternatif de remettre, aussi modestement que ce soit, en question et de façon constructive le "système financier" que l'on rend responsable de tout sans toujours essayer de comprendre les véritables causes des dérives. Un retour à la réalité du lien direct grâce au net ! Une chose est de se plaindre du "complot" des profiteurs financiers (jamais clairement identifiés d'ailleurs), un autre est d'agir concrètement comme le font ces start ups.

Un conseil auquel j'adhère:


                           Mon idée pour 2012: Jean-Christophe Capelli, PDG... par frenchweb

vendredi 4 mai 2012

You must be the change you want to see in the world

Ce très court billet sera ma réponse à tous les commentaires de cette période électorale attentiste et pré-dépressive. Soyons nous-mêmes les acteurs du changement que nous voudrions voir advenir comme le petit "Gandhi" du film ci dessous que je vous recommande.

Ce n'est pas une vidéo TED et nous l'avons choisie pour être sur la première page du site de TEDxLaDéfense. C'est dire si nous l'avons trouvée sympathique ! 




Je vous rappelle la date de notre événement: le 14 Juin, voir ici.