samedi 18 février 2012

Copier ou partager épisode 4 (Megaupload suite)

Voici un complément à mon dernier article sur la déconfiture de Megaupoad. Cette affaire illustre ces fameuses transformations discrètes qui sont sous notre nez et que nous ne voyons pas toujours.

Le point de vue d'un dirigeant indien, influenceur du web:

Pinstorm est une agence de communication sur le web, indienne et globale. Mahesh Murthy CEO de Pinstorm a largement contribué à lancer Yahoo et Amazon antérieurement, il me semble extrêmement crédible entre autre pour porter un regard sur l'affaire Megaupload.  EBP Lab est une plateforme web dédiée à l'identification d'innovateurs sociaux, entrepreneuriaux et environnementaux largement ouverte sur l'Inde notamment et qui a récemment invité Mahesh à Paris pour le présenter à un petit nombre de dirigeants français.

Je parlerai plus avant prochainement de Mahesh. Pour l'instant, voyons comment son point de vue d'influenceur des réseaux du net modifie ou complète le point de vue que j'ai déjà exprimé sur l'affaire Megaupoad. Commençons par le plus simple.

L'impérialime des lobbies américains:

L'action violente de l'État américain illustre la réalité d'un phénomène qui inquiète à juste titre. Elle justifie la réaction des "anonymous": la justice américaine ne peut théoriquement pas s'en prendre légalement de la sorte à des entreprises de Hong Kong, de Nouvelle Zélande ni à des ressortissants européens ne vivant pas sur son sol ... Que mes amis juristes viennent me contredire si je me trompe...
Cette image est ce que l'on trouve quand on veut télécharger un ebook sur le site de Megaupload France qui vient d'annoncer sa réouverture ...

Quelle que soit sa base juridique (réelle ou fabriquée), l'action américaine est simplement une action brutale qu'en d'autres temps, nous aurions qualifiée de totalitaire et d'impérialiste. Il semble clair que les USA ont usé de pressions en passant par dessus le droit souverain des états concernés pour faire un exemple ...

L'escroc tête à claques:

Ensuite, je maintiens que big Kim est un escroc et j'ajoute en ayant intégré les remarques de Mahesh, que c'est une tête à claques qui a stupidement provoqué les lobbies de l'entertainement business et qui a bêtement perdu la bataille de l'image: luxe ostentatoire, pratiques illégales sur la place publique, provocations multiples ... Jusqu'à son image physique mise en avant avec des vidéos le mettant en scène comme une rock star que la "bien-pensançe" du net ne peut durablement soutenir.

Les auteurs lésés:

Le gros Kim en facilitant le téléchargement gratuit d'oeuvres ne lui appartenant pas a trouvé un moyen de gagner de l'argent sans rien reverser aux auteurs. Du pillage pur et simple, de la prédation égoïste sous couvert d'altruisme en faveur des ados mélomanes ! Car sans auteur pas d'œuvres et comment produire des oeuvres si les auteurs ne peuvent en vivre ?

L'incontournable droit à la copie:


En même temps, ce qui est évident et que ne comprennent pas les média traditionnels en inspirant Acta, Sopa, Pipa et Hadopi , c'est qu'aucune puissance impérialiste au monde même avec toutes les polices et toutes les justices à sa botte ne pourra interdire la libre copie et les échanges gratuits sur le net. En tous cas, c'est à espérer.

L'irrésistible montée du modèle post-industriel global:


Il y a eu l' âge des lumières où, Voltaire interdit en France et protégé en Prusse, écrivait ses contes philosophiques et les faisaient circuler gratuitement sous le manteau pour être lus par quelques dizaines d'intellectuels dans les salons de quelques capitales ... Le monde a finalement fini par en être radicalement transformé.

Il y a eu ensuite l'âge industriel où quelques bourgeois capitalistes ont inventé la production de masse qui, pervertie par quelques poètes et jeunes gens iconoclastes et hédonistes, a fini par donner la société de consommation. Toutes les oeuvres grandes et petites sont devenues des produits achetés et vendus bientôt promues à grand renfort de média centralisés (journaux, radio, cinema, tv). La culture en boîte aux mains des médiacrates parisiens puis californiens. Corollaires: l'accès au public est limité aux auteurs reconnus, la plus grande partie des revenus va aux médias et aux éditeurs et à ces quelques auteurs. C'était l'ère du "one to many". L'oeuvre originale était finalement payée très peu. Par contre les nombreuses copies rapportaient beaucoup.

Tonymadrid Ph. CC-BY-NC-ND. Source : Flickr
Il y a maintenant le temps de l'internet, l'ère post-industrielle quoi qu'en pensent nos partis et nos intellectuels du passé qui aimeraient revenir en arrière. Chaque jour, 32 millions de personnes rien qu'en France se connectent à Google, pour une circulation totale de la presse papier de seulement 8,8 millions. Nous sommes entrés dans un âge qui conduit à un autre modèle, celui du "many to many".  Le net est la vitrine gratuite ou très peu chère qui permet de découvrir une oeuvre au quotidien. Ensuite, on va au concert ou au théâtre pour vivre une expérience "live" plus pleine et l'on paie les places très cher. Les facteurs sont inversés. Les copies sont gratuites, le live original est cher. (pour un article de fond sur les droits d'auteurs et la liberté, cliquez ici)

En quoi sommes-nous concernés ?

S'il avait voulu être juste, Big Kim aurait dû se préoccuper des auteurs, leur ouvrir ses sites, travailler en direction de la création, des jeunes auteurs, sponsoriser des spectacles originaux etc .... S'il avait voulu se protéger et durer, il aurait ainsi créé une image positive et défendable car en phase avec le phénomène. Il a pris sans réfléchir, sans contribuer au nouveau modèle, il va disparaître !

Cependant, Big Kim, n'est que le baobab qui cache la forêt ! Loin du spectaculaire et parce que je crois le mouvement irrésistible,  il faudrait donc plutôt chercher à convaincre d'une part les multiples sites qui ont déjà pris la place de Megaupload, d'autre part les "Majors" classiques de s'intéresser véritablement aux auteurs.

Un prochain article avec vidéo TED présentera un fascinante perspective sur le thème suivant: les auteurs constituent la véritable richesse et  tout le monde peut désormais devenir auteur ! Le véritable progrès qu'il faut défendre se trouve là. Parole d'auteur !

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