vendredi 17 juin 2011

Solar Impulse: quel rêve pour quelle réalité ?

Quand j'étais petit garçon dans les années soixante (1960s, pas 1860s !), les magazines que j'apercevais montraient souvent des images du progrès technique et scientifique représentées par les avions, et les fusées.  Cela faisait rêver les petits garçons et le monde entier. Certes  dans le même temps, les Mirages israéliens clouaient au sol les aviations syriennes et égyptiennes et les B52 américains noyaient la jungle vietnamienne sous des tonnes de défoliant ... Mais c'était pour la bonne cause et ce qui surnageait alors, c'était que la science et la technique portaient notre Société vers le Progrès ! Deux secteurs économiques symbolisaient ce progrès: le secteur pétrolier et le transport aérien. Chacun mettait ou espérait mettre un peu d'essence dans sa propre voiture pour le dimanche aller se promener à Orly et voir les avions avant de pouvoir  un jour y monter soi-même ... Le rêve et la réalité du progrès grâce au pétrole et au transport aérien ! A l'occasion du prochain salon du Bourget, les media nous présentent maintenant cet avion suisse propulsé à l'électricité produite par les capteurs solaires placés sur la la voilure.

Le rêve toujours mais sans pétrole ... Retour aussi aux images des premiers "plus lourds que l'air". Et si demain, les avions volaient grâce au solaire ? Rêve renouvelé ou illusion ? Déjà le prototype a dû recharger 40% de ses batteries au sol à une prise de courant... Quand on connaît le rendement des capteurs actuels, il est probable que nos longs courriers ne voleront pas ainsi avant longtemps !

C'est pourtant avec Solar Impulse le but que poursuit Bertrand Piccard (photo à droite): boucler un tour du monde sans escale et sans pétrole. Bon vent à lui. Vous pouvez trouver l'un de ses livres ci-après: Une trace dans le ciel

A cette occasion, je voudrais signaler deux débuts de réalité pour peut-être prolonger le rêve de façon tangible.

Vers des solutions relais et une poursuite du rêve:
FIAT, le constructeur automobile vient d'annoncer pour 2012 l'arrivée d'un revêtement fin intégrant des nano-capteurs solaires qui a un double avantage. Tout d'abord, le rendement électrique est sensiblement meilleur que celui des capteurs actuels, ensuite, s'agissant de revêtement fins voire d'une simple peinture, ce système serait peu coûteux à installer artisanalement comme industriellement. Le rêve technologique semble donc se prolonger. Il ne s'agira certainement pas de propulser complètement le véhicule mais de contribuer à recharger un moteur hybride et/ou les équipements électriques embarqués. Un bon début. Il y a encore un an, je croyais cette avancée technologique très éloignée et voilà que l'on commence à annoncer des applications pratiques dans les bâtiments, les véhicules, les appareils électroniques ... Je me propose de faire un billet plus précis sur ces nouvelles technologies très prochainement.

Vers un changement des usages et une forme de renoncement:
Ensuite, quelle est l'évolution prévisible du transport aérien ? La disparition du pétrole n'est peut-être pas pour tout de suite même si nous sommes probablement déjà au "peak oil". Cependant, nous pouvons  constater que le prix à la pompe s'envole et que des surtaxes sont déjà appliquées sur les billets d'avion pour compenser la hausse du prix du kérosène. Il n'y aura donc peut-être pas de grand soir écologique mais une transformation économique discrète: le renchérissement progressif du coût du transport et particulièrement du transport aérien devrait en réduire progressivement l'usage. On pourra certainement encore bombarder Kadhafi pendant deux générations et par ailleurs aller en avion en vacances ou en réunion à l'autre bout de la planète. Il faudra simplement être de plus en plus riche pour cela.

En quoi ceci nous concerne-t-il ?
On peut donc imaginer que les prédictions des économistes de la décroissance se réaliseront ici d'elles-même. Comme on peut prendre ses vacances dans le Cantal et qu'il est déjà largement possible de tenir ses réunions avec Skype sans sortir de son bureau, le voyage aérien a des chances de se limiter plus ou moins rapidement aux usages vraiment essentiels. Il faut donc aussi s'attendre à ce que les industries du tourisme de masse en soit lourdement touchées. Enfin, d'ici-là peut-être les nano-capteurs et d'autres technologies auront alors suffisamment progressé pour proposer des solutions relais c'est-à-dire plus économiques et accessoirement moins coûteuses également pour l'environnement. Il résulte de ces deux évolutions que le rêve reste permis mais que les transformations discrètes en cours annoncent donc A LA FOIS des solutions technologiques possibles mais aussi des remises en cause majeures de la société de consommation et du gaspillage telle que nous la connaissons.

3 commentaires:

jérôme a dit…
Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.
jérôme a dit…

Autrefois on a aussi été testé l'avion à pédale. Ce solar impulse a le mérite d'exister, c'est à peu près tout. Toute solution de transport pérenne doit pouvoir être mise en œuvre pour des millions de personnes et le solaire ne sera jamais adapté je crois, du moins dans les 50 ans qui viennent.
Pour ma part, mais c'est peut-être dû à l'âge, je crois plus au voyage rare et dense qu'au voyage tous les jours. Plus au scooter qu'à la Porsche pour tous. Une forme de décroissance mais qui amène à la densité.

Didier Chambaretaud a dit…

Bjr Jérôme,

Votre réponse m'a fait penser à Xavier de Maistre auteur du "Voyage autour de ma chambre". Ce militaire-artiste de la fin du 18ième a néanmoins voyagé dans toute l'Europe Napoléonienne et après. Assurément quelqu'un qui voyageait "dense" avec zéro émission de CO2.

Le problème c'est qu'il faisait partie des très rares privilégiés qui le pouvaient. 95% de la population de l'époque ne sortait jamais de son village.

Pas si sûr pourtant que le solaire ne contribue pas à garder le voyage possible ... Mais il me semble certain que la massification actuelle prendra fin prochainement.