Le billet que je vous propose aujourd’hui est une première. Je vous ai, à différents moments, parlé de Paul-Henri Pion. Economiste de formation puis manager au sein d’un grand groupe, devenu coach et psycho-praticien, Paul-Henri intervient auprès de personnes, pour les aider à affronter en thérapie brève des situations psychologiques personnelles, familiales, professionnelles voire managériales bloquées et génératrices de souffrance.
Paul Henri est l’auteur de deux ouvrages sur le lâcher-prise qui rencontrent actuellement un succès encourageant. Le plus récent est son Manuel du lâcher prise qui donne des explications simples et précises en plus d’éléments de mise en pratique. Cet ouvrage fait suite à un petit carnet très concret, conçu, lui, pour réaliser soi-même ses propres exercices: 50 exercices pour lâcher prise.
Le sujet du jour est donc le lâcher prise. Une originalité marque le présent billet: la vidéo ci-après est un probable futur "collector": elle est totalement originale et exclusive. C'est le premier interview que je réalise ainsi avec mon invité. Cela se passe dans le cabinet de consultation de Paul-Henri à l'occasion de la sortie de son dernier livre lors du salon 2011 à Paris, voici:
En résumé:
Le Lâcher prise est devenu un terme très en vogue dans le discours journalistique et aussi chez les DRH. Concept suspect parfois, il recouvre pourtant une réalité courante. Il s'agit d'une pratique et de techniques permettant à tout un chacun de "dépasser son propre jugement pour rencontrer l'évidence" quand existe un blocage qui fait souffrir malgré des efforts bienveillants et opiniâtres . Par exemple, le parent bien intentionné qui se heurte à un refus ou à une opposition de plus en plus forte de son enfant et qui ,ne sachant que faire d'autre, ne fait, par son insistance, que renforcer cette opposition et la souffrance générale de la famille. Lâcher prise prend alors souvent l'apparence de soudain faire tout le contraire. Ce n'est en aucun cas laisser-faire, ni renoncer, c'est retirer souvent de façon paradoxale ce coin qui bloque la relation et rencontrer l'évidence puis trouver l'angle d'action approprié pour enfin que la vie reprenne son cours naturel. Voici des articles de Paul-Henri pour aller plus loin.
En quoi ceci nous concerne-t-il (1) ? De nouvelles médiations pour dissoudre les tensions.
Pour Paul-Henri, notre société urbanisée, concentrée, compartimentée, dispose de moins en moins d'espace où, pour reprendre l'une de ses images, "le regard de l'individu peut se poser sur l'horizon". La concentration de l'espace de vie et de l'agenda ont fait disparaître les lieux et les moments naturels et sociaux où pouvaient se dissoudre les tensions et se dépasser les blocages. Comme le chante mon poète belge favori, Julos Beaucarne (rassurez-vous, ce n'est pas Paul Jorion !!!):
"un pet trop longtemps retenu
fait un abscès au trou du cul"
Je vous renvoie en outre premièrement au "Talk" de William Ury, grand spécialiste de la négociation raisonnée qui cherche lui-aussi à débloquer des situations de guerre entre Etats. Et dans cette conférence TED, il nous relatait son expérience vécue au sein d'un groupe de Bushmen d'Afrique australe qui applique toujours à l'heure actuelle des méthodes de Lâcher Prise traditionnelles mais qui devraient nous inspirer. Je vous renvoie de la même manière à la conférence de Jean Pierre Massias sur la paix.
Je vous renvoie deuxièmement à mon billet sur la médiation de conflits, l'un de mes thèmes d'études du moment et qui, du fait de l'encombrement des tribunaux, devrait se développer.
En quoi ceci nous concerne-t-il (2) ? Le Lâcher Prise une discrète nécessité !
Notre société se transforme discrètement, j'en ai fait l'un des thèmes de ce blog à la suite de F. Jullien. Elle a besoin de ces nouvelles médiations structurées car grosses des travaux de recherche en psychologie comportementale et aussi renouvelées, décapées et simplifiées. Paul-Henri le fait pour l'individu et sa carrière ou sa famille, Ury et Massias le font dans le conflits armés, le médiateur le fait entre partenaires d'affaires ou dans une lutte sociale.
Car les sociologues nous le disent, les méthodes traditionnelles des Bushmen n'ont plus cours chez nous depuis longtemps, les notables, les figures d'autorité, les dogmes religieux sont de moins en moins respectées, les cellules familiales sont chamboulées. Le monde du travail, lui, prétend encapsuler, encadrer, "procéduriser", sécuriser, traçabiliser. Ce qui est probant en milieu industriel devient lourd quand il s'agit d'harmoniser des rapports humains. Pire, dans cette recherche de mise sous contrôle, notre Société se dope à la "Moraline" comme dit M. Onfray et censure toutes les marges d'adaptation naturelles. Voyez aussi dans ce blog ce que dit Miguel Benasayag sur légalité et légitimité et la "morale situationnelle" qui, entre dogme absolu et relativisme trop complaisant, requiert des marges adaptatives sans lesquelles la Société est invivable.
Ajoutons encore un caillou dans la marre: Michel Onfray explose les ventes de livres philosophiques en pourfendant (à mon avis, à juste titre) l'imposture freudienne, du coup même aux gens fortunés capables de se payer une analyse pendant dix ans, il ne reste plus aucune illusion !
Alors aux petits malins qui vont me parler du "petit peuple" qui s'intéresse moins à la psychanalyse qu'au sport et au PMU, je répondrai ceci: le foot, il ne faut plus y penser comme exutoire socialement salutaire depuis le passage de Domenech et maintenant le "pchitt" de l'affaire des quotas. J'aurais bien été tenté de vous renvoyer vers mon sport favori, le rugby, dont les vertus uniques sont décrites dans mon premier billet sur Michel Serres et le contrat guerrier. Or depuis "l'affaire" Chabal, je crois que la FFR comme la FFF et nos média devraient se mettre à la lecture urgente de l'excellent Manuel du lâcher prise de Paul-Henri Pion.
Ces techniques discrètes d'intermédiation efficace sont donc devenues une nécessité.
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RépondreSupprimerTravail intéressant.
RépondreSupprimerCe n'est pas dit ici mais je crois que le secret du lâcher prise c'est de comprendre que l'on peut rester soi-même en sortant d'un rapport de force. Cela dit, ne passe-t-on pas pour une anguille si l'on fait ça très souvent, le lâcher prise ne passe-t-il pas seulement pour de l'habileté ?
Bonjour,
RépondreSupprimerMa compréhension du travail présenté ici est qu'il s'agit d'une technique visant à sortir d'un blocage. là est en effet l'habilité. Ce n'est pas pour rien qu'il existe de bon négociateurs et de mauvais par exemple. Mais au fond, il s'agit de se retrouver vraiment, de retrouver l'évidence et donc il ne peut s'agit de chercher à tromper ou à se tromper.
Merci pour ce commentaire.
Cdt
DC
Bonjour Didier.
RépondreSupprimerJ'ai trouvé votre article fort enrichissant, mais la vidéo n'a pas démarré. Il est apparu la mention "Cette vidéo est privée"....
Dommage !
En tout cas, tout le reste est excellent, on explore tous ces liens avec délectation. Bravo !