Jérémy Rifkin est assez peu connu du public français mais je profite de cette vidéo sous-titrée pour vous le présenter. C'est un auteur important dans le monde anglophone et un conseil des gouvernements américains et européens sur les questions de prévisions économiques et sociales à long terme notamment après le succès de son livre "La fin du travail".
Voici qu'il s'exprime ici (film réalisé par Terre tv) sur l'énergie nucléaire et particulièrement sur la France, ceux qui me connaissent savent pourquoi ce sujet me touche personnellement et là, je crois que son propos ne peut laisser personne indifférent:
En résumé:
Selon J. Rifkin:
1) Le nucléaire était déjà mort il y a 20 ans mais la mise en avant du changement climatique lui a permis de renaître avec l'argument que le nucléaire, n'émettant pas de CO2, était une énergie propre.
2) Aujourd'hui, il est évident que le nucléaire est bien une énergie du passé, cette industrie est morte car:
- les 443 vieilles centrales nucléaires de la planète ne produisent que 6% de l'énergie, il faudrait des milliers de milliards de $ pour en construire 1500 nouvelles pour atteindre 20% des besoins énergétiques et ainsi avoir un impact perceptible sur le changement climatique. Aucune chance que cela se fasse. L'argument tombe.
- le problème du traitement ou du stockage des déchets n'est pas résolu.
- la sécurité des centrales, en France comme ailleurs, n'est pas assurée en cas de secousses telluriques, les barres de combustibles hors du coeur du réacteur sont vulnérables et peuvent causer une irradiation en cas de cataclysme comme à Fukushima.
- la ressource en uranium sera déjà insuffisante pour le parc de centrales existantes et le prix ne peut donc que grimper.
- la transformation de l'uranium en plutonium constitue un risque en cas de détournement terroriste.
- en France, 40% de l'eau douce servirait actuellement à refroidir les centrales et deviendrait ainsi impropre à l'utilisation agricole.
Une énergie issue d'une pensée du passé
Rifkin poursuit avec une idée que je trouve séduisante. Le nucléaire est l'archétype d'une industrie et d'un mode de pensée s'appuyant sur une vision qui a fait progresser les Etats "modernes" dans le passé: la centralisation. Prenant une analogie avec l'industrie de la musique qui disparaît au profit des téléchargements sur le net, les journaux qui s'effacent devant la blogosphère, wikipédia qui supplante l'encyclopédie Britannica, Linux qui dépasse Microsoft, le modèle de production d'énergie contrôlé d'un centre et redistribuant vers une périphérie sera supplanté par un modèle collaboratif sans aucun centre. Les nouvelles générations ne voudront tout simplement plus supporter les mastodontes centralisés risqués et pollueurs (comme EDF) quand les bâtiments, les instruments et même les véhicules pourront produire leur propre énergie verte et la partager "latéralement"sans contrainte.
En quoi sommes-nous concernés ?
Nous devrions amener les hommes politiques à préparer activement l'avenir de nos enfants qui comme le dit Rifkin ne pourront plus supporter les modèles anciens. Pour cette raison au moins, le nucléaire n'a plus d'avenir. J'ajouterai (et je le publirai bientôt) qu'en matière d'énergie, Richard Hall Tipping m'a convaincu à TEDGlobal que l'apport des nanotechnologies rend très vraisemblable la vision d'avenir que présente J Rifkin. Je veux bien admettre qu'il y a encore une incertitude sur le coût environnemental de ces technologies mais je suis prêt à prendre le pari que cette incertitude n'est rien au regard de ce que nous annonce Rifkin !!!
La révolution des transformations discrètes:
Ne trouvez-vous pas frappante l'idée que la révolution est déjà en train de s'accomplir juste sous notre nez ? Les transformations discrètes dont j'ai parlé sont à l'oeuvre. Les crises que nous vivons ne sont-elles pas seulement les craquements superficiels des changements sous-jacents ?
Un point complet sur les nanotechnologies s’impose !
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RépondreSupprimerInterview très intéressante.
RépondreSupprimerClair que chez moi je cherche des solutions pour économiser ou produire de l'énergie, stocker de l'eau, même produire des légumes ou de l'huile...
Les politiques sont tenus par des lobbies qui tiennent leur importance de la place que les politiques leurs donnent. Avant qu'ils aient assez taxé les mutuelles santé, nous aurons trouvé une solution pour nous en passer. Il n'est que voir ce que Free est en train de provoquer sur le marché du téléphone portable alors qu'il n'y est pas encore et que Sarkozy a attendu 4 ans pour les autoriser. Nous trouvons des solutions mais en même temps nous continuons de payer pour ce qui est d'hier (abonnnement France Télécom, nucléaire de la France, armée de terre...). Les fabricants de diligences ne sont pas devenus fabricants d'automobiles.
Peut-on pour autant penser que la révolution est en cours ? Une révolution permettrait de mettre des types comme J. Rifkin à la tête de l'état. Il est probable que c'est le cas en Finlande ou en Suède, les gouvernants ont compris le monde tel qu'il est. Nous ne chasserons pas ceux qui nous font payer les erreurs du passé uniquement par des contributions sur des blogs, j'en ai bien peur...
En effet ce blog n'est pas un outil pour faire la révolution ...
RépondreSupprimerJe partage votre opinion sur les lobbies et cela ne change rien à ce que je relate ici des changements en cours.
Je voudrais insister sur le fait que je ne parle aucunement ici de changements révolutionnaires par référence aux périodes historiques violentes identifiées comme telles dans les manuels. Je parle des transformations majeures qui sont en cours de façon discrète par référence à ce que F Jullien nous apprend de la philosophie chinoise.
Merci pour vos commentaires.
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RépondreSupprimerLe nucléaire se meurt-il ? j'y reviendrai en fin de commentaire.
RépondreSupprimerBeaucoup des arguments de Rifkin sont superficiels. Fort de son aura, s’est-il donné la peine de travailler le sujet?
Le coût pour amener à 20% la part du nucléaire est considérable mais il va de même avec d'autres techniques. Si l'humanité a vraiment besoin d'une telle transformation, au nom du CO2 ou de l'épuisement des combustibles fossiles, ces milliards, elle les fabriquera à partir de rien, s’il est encore temps. C’est bien dans le monde matériel que les choses se jouent.
L'argument de la raréfaction de l'uranium, et pour partie celui des déchets, ignore la technologie des réacteurs rapides, au sodium, à sels fondus, etc. et également la filière thorium. Suivons-bien ce que fait l'Inde, là où les projets avancent.
Le problème de l’eau se pose à la filière électrique de la même façon pour le charbon, le pétrole et le gaz. Notons au passage sans développer que les prélèvements d’eau perturbent localement le cycle de l’eau mais ne détruisent pas la ressource qui est abondante (pensons aussi aux océans).
Les risques sismiques se règlent par le choix des sites et le dimensionnement. Il s’agit de quelques pourcents. Le problème est la façon dont sont prises les décisions.
Si le nucléaire meurt un jour, ce sera, plutôt que d’une impasse technique, d’une incapacité humaine, managériale et politique, à en maîtriser les risques de façon éthique et transparente. C’est cela plutôt qu’autre chose que m’évoque le drame de Fukushima et d’autres incidents.
Merci à Olivier pour ce commentaire.Je vais regarder la filière Thorium et ce que fait l'Inde.
RépondreSupprimerPour moi, il nous reste à tirer parti de notre parc au mieux (en croisant les doigts) car l'argument de Rifkin ne vaut pas vraiment pour la France, nous couvrons déjà 70% de nos besoins électriques par le nucléaire.
Cela nous aidera probablement dans la transition que nous avons à faire. Je suis bien d'accord qu'il y a un problème de prise de décision. La toute-puissance du nucléaire n'a pas aidé en France à aller vers d'autres énergie ...
Mais la bonne nouvelle c'est qu'Areva est désormais champion des énergies qui ne dégagent pas de CO2 ! Voilà donc un pas de progrès.